La BoE au chômage technique
omme de nombreuses banques centrales, la Banque d’Angleterre (BoE) est confrontée à la question de savoir à quel rythme elle pourra continuer à assouplir sa politique. Cet été, la conviction que la baisse de l’inflation était suffisamment bien engagée pour que l’attention puisse se tourner vers le soutien à la croissance s’est répandue. La BoE a (prudemment) adhéré à cette tendance globale. En août, elle a abaissé son taux directeur de 25 pb – malgré la lenteur exaspérante du refroidissement de l’inflation de base et de l’inflation des services. Au début de ce mois, Bailey et ses collègues sont parvenus à une conclusion similaire (-25 pb, à 4,75%). Les choses en resteront là pour l’instant.
Le taux d’inflation pour le mois d’octobre publié hier a fait office de rappel à la réalité. L’inflation générale a de nouveau rebondi (0,6% en glissement mensuel; 2,3% en glissement annuel, contre 1,7% en septembre). Cela s’explique principalement par la hausse des tarifs (régulés) de l’énergie. Néanmoins, des indicateurs sous-jacents laissent aussi entendre que le refroidissement de l’inflation suit une trajectoire houleuse. L’inflation de base s’est accélérée (0,4% en glissement mensuel et 3,3% en glissement annuel, contre 3,2%). Les prix des marchandises sont toujours inférieurs de 0,3% par rapport à octobre de l’année dernière, mais la dynamique mensuelle (+0,8%) suggère que leur effet modérateur sur l’inflation totale est en train de diminuer. En parallèle, l’inflation des services a repris de la vitesse (0,4% en glissement mensuel et 5,0% en glissement annuel, contre 4,9%).
Cette dynamique déjà décevante en soi se manifeste dans le contexte du budget du nouveau gouvernement Labour. Selon les premières analyses de la BoE, le budget portera la croissance à 1,7% l’année prochaine, tout en entraînant une révision à la hausse des projections d’inflation (T4 2025: de 2,2% à 2,7%). En outre, on peut se demander dans quelle mesure les entreprises répercuteront une augmentation des cotisations sociales et des salaires sur le client final.
Les politiques monétaire et fiscale sont des vases communicants. Si la politique fiscale s’accélère, la politique monétaire doit devenir plus prudente. Il semble que le gouvernement se soit en grande partie approprié la marge de manœuvre déjà limitée de la BoE. De ce fait, le marché exclut pour ainsi dire un nouvel abaissement de taux en décembre. Pour la BoE, il serait convenable et logique de mettre en œuvre les abaissements suivants lors des réunions où elle disposera d’un nouveau rapport de politique (en février et en mai). Mais pour le marché, ce scénario n’est pas non plus couru d’avance (estimation de ± 80%). Quant à savoir si l’ère Trump le rend plus ou moins probable, c’est un facteur d’incertitude supplémentaire.
Hier, la livre a légèrement gagné du terrain par rapport à l’euro, mais la paire EUR/GBP reste provisoirement au-dessus de 0,83. Ces temps-ci, c’est la faiblesse de l’euro plutôt que la vigueur de la livre qui décide du sort du ‘chunnel’, et cela risque de ne pas changer de sitôt. Le marché part du principe que la BCE ‘n’aura pas d’autre choix’ que d’abaisser encore fortement le taux. Le cours EUR/GBP 0,8250/8202 (planchers d’avril/mars 2022) reste la prochaine zone cible/un soutien important sur les graphiques techniques. Dans la mesure où les taux longs britanniques surtout sont l’expression d’une prime de risque (budgétaire) plutôt que d’une politique restrictive attendue, ils ne constituent pas nécessairement un soutien pour la livre.