La MNB contrainte de prolonger sa pause
Comme en octobre, la Banque nationale hongroise (MNB) a maintenu son taux d’intérêt inchangé à 6,50% hier. Jusqu’à nouvel ordre, la MNB parle de pause, mais la reprise des mesures d’assouplissement ne dépend pas entièrement d’elle. Le contexte financier et son impact sur le forint seront décisifs.
D’un point de vue domestique, à première vue, il reste de la marge pour abaisser les taux. L’accélération redoutée de l’inflation en octobre est finalement restée limitée (0,1% en glissement mensuel; 3,2% en glissement annuel) et proche de l’objectif de 3,0% fixé par la MNB (avec une tolérance de ± 1,0%). L’inflation de base a même continué à baisser (de 4,8% à 4,5%). Difficile de qualifier la croissance d’inflationniste: avec une contraction de 0,7% en glissement trimestriel, l’activité s’avère en fait en baisse de 0,8% par rapport au T3 de l’année dernière. Formellement, l’économie hongroise est en récession (deux trimestres consécutifs de croissance négative). En principe, un excédent de la balance des transactions courantes contribue aussi à la stabilité financière (la MNB espère qu’il s’élèvera à 2% du PIB cette année).
Et pourtant. Pour que la MNB puisse finalement poursuivre l’abaissement du taux directeur, ce n’est pas cette stabilité financière-là qui compte. La hausse des taux aux États-Unis en raison des élections présidentielles ont mis le forint (à l’instar de nombreuses autres devises des pays émergents) sous pression. De EUR/HUF 392 début octobre, le cours a grimpé à 412 à la suite du retour de Donald Trump à la Maison-Blanche. Cet affaiblissement (trop) rapide de la devise va de pair avec des risques d’inflation. Un forint faible se traduit aussi par une pression accrue sur d’autres actifs hongrois, y compris les obligations – même si les pouvoirs publics s’efforcent d’atténuer cet effet par le biais ‘d’interventions techniques‘. En somme, la stabilité financière et plus précisément un forint ‘stable’ est une condition sine qua non pour se remettre en route sur la voie de l’assouplissement; condition qui n’est manifestement pas remplie à l’heure actuelle.
Au niveau domestique aussi, le contexte continue d’évoluer, et pas forcément dans la bonne direction. Vu la faiblesse du forint et les changements dans la politique fiscale, l’inflation pourrait se maintenir autour de la limite supérieure de 4% l’année prochaine. Pour 2025, KBC s’attend à un taux moyen de 3,8% (3,7% cette année-ci). La MNB admet aussi que les anticipations inflationnistes des Hongrois restent élevées, avec un risque de prophétie autoréalisatrice. Enfin, le marché entretient de sérieux doutes quant au budget hongrois. Ces dernières années, le gouvernement n’a pas atteint son propre objectif et avec les élections à venir en 2026, ce ne sera pas évident l’année prochaine non plus.
La MNB ne renonce pas à l’idée d’autres abaissements de taux. Lors de la conférence de presse, le vice-gouverneur de la MNB, Virag, a préféré parler d’une pause prolongée. Cela n’empêche que la MNB est peut-être prise dans un dilemme autodestructeur. Si le forint se renforce suffisamment sans générer de pression inflationniste supplémentaire, elle aura hâte d’exploiter cette marge de manœuvre pour soutenir la croissance. Mais quant à l’ampleur de la marge, le marché se montre généralement plus conservateur dans son estimation que la MNB. Vu l’objectif d’inflation plus élevé de la MNB par rapport à d’autres pays, le forint est déjà une devise en baisse tendancielle et c’est d’autant plus vrai dans un contexte de volatilité des marchés. À court terme, il n’y a pas de voie toute tracée pour un retour du cours EUR/HUF dans la zone de 395/400, le point de départ de sa dépréciation récente.