Une nouvelle ère…
Le symposium de la Fed à Jackson Hole marque traditionnellement la fin de la trêve estivale dans la communication de la Fed (et celle de nombreuses autres banques centrales). Dans son discours d’ouverture, Jerome Powell s'est montré très clair sur ce qui nous attend cet automne, à savoir une nouvelle phase de la politique monétaire.
Après une période marquée sous le signe de la lutte contre l’inflation, la Fed se concentre désormais à nouveau sur le deuxième objectif de son mandat, le plein emploi. Comme à son habitude, Powell a délivré un message clair. L'heure est venue de changer la politique. Après un début d’année hésitant, le président de la Fed est convaincu que l’inflation a durablement pris la direction de l'objectif de 2 %. Parallèlement, le marché du travail n’est plus en surchauffe. Le taux de chômage reste faible (4,3 %), mais augmente progressivement. Pour l’instant, cette hausse est davantage due à une augmentation du nombre de personnes arrivant sur le marché de l'emploi qu'à des licenciements. Mais le refroidissement ne fait aucun doute. La croissance des salaires ralentit et l'inflation n'est plus alimentée par les tensions sur le marché de l'emploi. Pour la Fed, ce dernier n'aurait d'ailleurs pas intérêt à ralentir davantage. Le président de la banque centrale ne s’est pas prononcé sur le rythme du cycle d’assouplissement, mais il a laissé entendre qu'il disposait de suffisamment de marge pour faire face aux risques. Un message bref mais très clair à l'attention du marché.
Vendredi après-midi, les taux américains se sont encore repliés (jusqu’à 8 points de base de baisse). Le message est une chose. Le positionnement de marché en est une autre. Ce dernier s'attend à une baisse de taux de 1 % au total sur les trois réunions restantes de la Fed cette année. À un moment ou à un autre, il anticipe donc une intervention de 50 pb. D'ici à la fin de l’année prochaine, le marché table toujours sur 1,25 % de baisse supplémentaire, avec un taux directeur évoluant donc progressivement vers les 3 % (5,25 %-5,50 % actuellement).
Malgré leur nouvelle chute vendredi, les taux restent pour l’instant au-dessus des planchers du début du mois (3,80 % pour le taux à 2 ans et 3,78 % pour le taux à 10 ans). L'heure est probablement venue de se poser un peu avant les publications cruciales du début du mois prochain (ISM, « payrolls »).
En attendant, le dollar demeure sur la défensive. Cela s'explique évidemment en partie par le resserrement du différentiel de taux avec les autres grandes devises. La Fed dispose en effet d’une plus grande marge d'assouplissement. Mais même si les autres grandes banques centrales (BCE, BoE, RBA…) suivent plus ou moins son exemple, un véritable retour du billet vert reste incertain. Un assouplissement général des conditions monétaires joue généralement en faveur des devises présentant un profil de risque plus prononcé et en défaveur du billet vert. Un positionnement véritablement hostile au risque (« risk-off ») permet en principe au dollar d’assumer son rôle de valeur refuge, sauf si la cause se trouve aux États-Unis (ex. : crainte d’une récession américaine début août). Dans ce contexte, le message est une nouvelle fois le suivant : mieux vaut ne pas aller à contre-courant pour le moment.