Doutes autour de la Bank of England
Plutôt le Tafelberg sud-africain que le Matterhorn suisse. À la fin du mois dernier, l’économiste en chef de la Banque d’Angleterre, Huw Pill, a clairement montré la voie que la banque centrale comptait suivre pour ramener l’inflation à l’objectif de 2 %. La route abrupte du Matterhorn offre l’avantage d’un retour plus rapide, mais le revers de la médaille est un désastre économique. Avec la route du Tafelberg, la BoE prendra plus de temps, mais la stabilité de cette piste est plus qu'appréciable.
Avant les vacances, les taux du marché monétaire britannique anticipaient pourtant toujours le scénario du Matterhorn. Début juillet, ils tablaient sur un pic agressif du taux directeur de pas moins de 6,5 %, compte tenu de l'absence de la décélération/récession tant redoutée. La donne a changé depuis lors. L’indicateur de confiance PMI composite britannique est tombé en août sous la barre symbolique des 50 points, qui sépare la croissance de la contraction. Après l’industrie manufacturière axée sur les exportations, le secteur des services intérieur est également en train de se replier. Au début de cette semaine, les chiffres du marché de l’emploi britannique ont de nouveau fait état de licenciements nets, ce qui a poussé le taux de chômage à 4,3 %, son niveau le plus élevé depuis septembre 2021. Avant l’éclatement de la pandémie (2019), le taux de chômage oscillait entre 3,8 % et 3,9 %. La faiblesse de la croissance et la diminution des tensions sur le marché du travail prennent de plus en plus d'importance aux yeux de la BoE, même si les salaires augmentent et que l’inflation de base sous-jacente (6,9 % en glissement annuel) se maintient obstinément autour de son sommet cyclique de mai (7,1 % en glissement annuel).
Jusqu’il y a peu, le discours officiel de la BoE était qu'un (dernier ?) relèvement de 25 points de base à 5,5 % aurait lieu la semaine prochaine. Actuellement, les marchés monétaires tablent également sur ce pic. Un certain doute s'est néanmoins installé depuis peu. Dans un témoignage devant le parlement britannique la semaine dernière, le président de la BoE, Andrew Bailey, s’est montré particulièrement optimiste quant à la fin imminente du cycle des taux. L’effet des resserrements déjà opérés va se faire sentir dans les prochains mois. Rappelant son surnom peu flatteur de « unreliable boyfriend », Bailey n'hésite jamais à changer son fusil d'épaule au dernier moment. Les faibles chiffres du marché de l’emploi publiés cette semaine pourraient encore gagner en poids la semaine prochaine si les chiffres de l’inflation (publication mercredi, veille de la réunion de la BoE) surprennent favorablement. En outre, la banque centrale britannique annoncera en principe un nouveau montant cible pour la taille de son portefeuille obligataire. En novembre de l’année dernière, elle avait commencé par mettre un terme aux réinvestissements et par des ventes actives dans le portefeuille. Ensemble, ces mesures devaient réduire l’encours de 80 milliards de livres, à 815 milliards. Un nouvel objectif plus ambitieux pour les 12 prochains mois pourrait aller de pair avec une pause dans les taux.
Depuis début juin, la livre sterling évolue dans une fourchette extrêmement étroite grosso modo comprise entre EUR/GBP 0,85 et 0,87. Une approche plutôt réservée de la Banque d’Angleterre joue en défaveur de la devise britannique. Surtout lorsque le contexte général du risque se détériore en même temps que la croissance (globale). Nous nous attendons à une rupture au-dessus de 0,87 en automne, ce qui ouvrira la voie vers une nouvelle fourchette située entre 0,87 et 0,90.