Redémarrage monétaire en vue pour la CNB?
La semaine dernière, la Fed et la BCE ont quelque peu volé la vedette aux réunions de politique des ‘petites’ banques centrales (Reserve Bank of Australia, Norges Bank, banque centrale tchèque). Pourtant, la prise de décision de la banque centrale tchèque (CNB) surtout a donné matière à réflexion aux observateurs.
De manière générale, le marché s’attendait à un non-événement. Après un cycle de resserrement rapide entre juin 2021 et juin 2022, la CNB maintient son taux directeur à 7% depuis près d’un an. Cette pause date du moment où Ales Michl, qui a la réputation d’une colombe monétaire, a succédé au ‘faucon’ Jiri Rusnok le 1er juillet 2022. Dans un premier temps, il y a eu lieu de se demander si la CNB ne mettait pas fin prématurément au cycle des taux, surtout quand l’inflation a atteint 18% et s’est ensuite maintenue au-dessus de 15,0%. La CNB de Michl continuait à indiquer qu’elle pourrait encore relever les taux. Mais les marchés n’y ont vu que de la communication tactique et s’intéressaient davantage au timing du premier abaissement des taux. La semaine dernière, ce point de vue a été sérieusement mis à mal. La CNB a certes laissé le taux directeur inchangé à 7,0%, mais il y a un mais: trois des sept membres du conseil ont voté en faveur d’un relèvement de 25 points de base. La CNB reste également disposée à maintenir une couronne forte par le biais d’interventions sur les taux de change.
D’un autre côté, les taux plus élevés et l’appréciation de la couronne freinent l’octroi de crédit et la demande. Nourrissant l’espoir d’une baisse de l’inflation plus tard dans l’année, la CNB s’attend même à un taux directeur réel fortement positif. Néanmoins, elle n’est pas certaine que cela suffira à ramener durablement l’inflation à 2,0%. Pour cette année, les prévisions d’inflation moyenne ont été relevées à 11,2%. Pour l’année prochaine, elles restent à 2,1%. De même, en dépit des craintes initiales, la croissance se portera mieux cette année (0,5% au lieu de -0,3%) et l’année suivante (3,0% au lieu de 2,2%). Mais la CNB s’inquiète de la pénurie sur le marché du travail, susceptible de maintenir une spirale prix-salaires. De plus, le gouvernement est maintenant averti: pour garder l’inflation sous contrôle, il faudra absolument mener une politique fiscale plus restrictive. En conclusion, la CNB décidera lors de sa prochaine réunion si elle maintient le taux à son niveau actuel ou si elle procède à un nouveau relèvement. Elle qualifie également de prématurées les prévisions du marché quant à un premier abaissement des taux dans l’année. Un premier test clé aura lieu dès jeudi, avec la publication des chiffres de l’inflation pour le mois d’avril (taux attendus: 0,4% en glissement mensuel, 13,3% en glissement annuel à partir de 15,0% en glissement annuel), même si le taux d’inflation du mois de mai et la croissance salariale pour le premier trimestre suivront encore avant la prochaine réunion du 21 juin. À cet égard, une hausse surprise renforcerait encore l’analyse de la CNB.
Chaque banque centrale opère dans son contexte propre. Par exemple, le contexte tchèque n’est pas directement transposable aux États-Unis, où d’autres sujets (stabilité financière, plafond de la dette) influencent les discussions. Mais après le relèvement inattendu opéré il y a peu par la Reserve Bank of Australia, le débat relatif à un redémarrage éventuel du cycle des taux en Tchéquie constitue bel et bien un autre avertissement qu’une pause n’est pas forcément le signe d’un abaissement imminent des taux. En durcissant son discours, la CNB pourrait également apporter un soutien durable à la couronne. Même si elle cote actuellement à ses niveaux les plus élevés depuis 2008, la CNB préfère toujours une devise trop forte que trop faible. À court terme, la paire EUR/CZK a trouvé un nouvel équilibre dans la zone 23,20/23,70.