La zone euro n'échappe pas au double creux
La zone euro n'échappe finalement pas au double creux. Ce mardi, Eurostat a publié son estimation "flash" concernant la croissance dans la zone euro et l'UE27 au quatrième trimestre de 2020. Le taux de croissance trimestriel de respectivement -0,7% et -0,5% confirme le double creux. La bonne nouvelle est que les chiffres sont nettement moins négatifs qu'initialement prévu. Mais ce n'est pas totalement une surprise. Les premières estimations de plusieurs offices nationaux de statistiques avaient déjà abondé en ce sens la semaine dernière. Certaines économies ont même de nouveau enregistré une croissance positive, malgré une deuxième vague de contaminations et les mesures de confinement. L'Allemagne (0,1%), l'Espagne (0,4%), le Portugal (0,5%) et… la Belgique (0,2%) ont ainsi connu une croissance (très légèrement) positive. Le fait que l'estimation "flash" de la croissance dans l'UEM soit finalement négative est surtout dû aux taux de croissance assez négatifs dans plusieurs grands pays comme la France (-1,3%), l'Italie (-2,0%) et l'Autriche (-4,3%).
Ces résultats meilleurs que prévu signifient que la contraction économique a été moins marquée que redouté initialement en 2020. Pour la zone euro, le recul s'élèverait à 6,8%, soit nettement moins que la dernière prévision de la BCE (7,4%) et que les estimations de la majorité des prévisionnistes professionnels (75%) sondés par la BCE. La zone euro reste malgré tout beaucoup plus affectée par la crise que d'autres grandes économies comme les États-Unis (-3,5%) ou la Chine, qui est même déjà repassée en territoire positif en 2020 (2,1%).
Si la zone euro n'a donc finalement pas pu éviter un double creux, ces premiers résultats provisoires témoignent tout de même d'une économie européenne assez résiliente. La question cruciale reste de savoir si cela s'explique par une vigueur structurelle ou plutôt par des facteurs externes et/ou temporaires. Les mesures sanitaires plus ciblées ont permis une gestion plus efficace de la pandémie et une grande partie de l'économie, l'industrie, a été épargnée par des mesures trop strictes, ce qui a permis de limiter les dégâts sur l'économie. En outre, le secteur des services est aussi globalement parvenu à limiter les pertes économiques. Toutefois, des facteurs externes et/ou temporaires tels que la reprise du commerce international, la constitution de stocks en prévision du Brexit et les nouvelles mesures de relance budgétaires jouent vraisemblablement aussi un rôle.
Reste maintenant à savoir si ces prévisions positives se traduiront dans les futurs développements économiques – surtout si les mesures de soutien commencent à être progressivement démantelées.
Les estimations "flash" meilleures que prévu ont un certain nombre d'implications statistiques importantes – ce que l'on appelle les effets de transition. À prévisions de croissance (trimestrielle) inchangées, l'augmentation du PIB de la zone euro au quatrième trimestre 2020 entraînera automatiquement une croissance annuelle moyenne attendue plus élevée pour 2021. Notre analyse montre que ces effets de transition varient entre 0,3 et 3,6 points de pourcentage pour les grands pays de la zone euro. Pour l'ensemble de la zone, l'effet de transition s'élève à 2,1 pp. Cette "distorsion" statistique de la dynamique de croissance annuelle doit donc être prise en compte dans l'interprétation des nouvelles perspectives. Les chiffres de croissance publiés demeurent également des estimations "flash". Les ajustements constituent davantage la règle que l'exception. Nous attendons le 16 février pour une première révision ou une confirmation de ces chiffres.