L’EUR/USD franchit le cap de 1,20
Une époque exceptionnelle exige des mesures exceptionnelles. En raison de l’incertitude liée au coronavirus, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) avait élaboré deux scénarios de croissance possibles en juin: un scénario avec une reprise après l’été et un scénario fondé sur une recrudescence du virus et un double coup de massue pour l’économie. Hier, l’institut a publié ses nouvelles perspectives de croissance semestrielles. Mauvaise nouvelle: le scénario pessimiste s’est réalisé. La consolation est que le choc économique est moins rude que prévu.
Les nouvelles perspectives de l’OCDE se fondent sur une contraction de 4,2% du PIB au niveau mondial. Un pays sortirait du lot: la Chine, où l’annus horribilis 2020 aura commencé, et qui sera d’ailleurs la seule à clôturer l’année sur un bilan positif (+1,8%). En outre, il y a des différences de taille entre les autres “grands” blocs économiques: -3,7% pour les États-Unis, -5,3% pour le Japon, -7,5% pour la zone euro et -11,2% pour le Royaume-Uni. Ajoutons à cela que les performances relativement robustes de l’économie allemande (-5,5%) tirent vers le haut la moyenne européenne. D’ici, la voie de la reprise sera tout aussi inégale. Selon l’OCDE, le PIB des États-Unis, par exemple, sera déjà supérieur à son niveau pré-pandémie dès la fin de l’année prochaine, tandis que PIB du Royaume-Uni sera toujours inférieur à ce niveau de plus de 5%. L’économiste en chef de l'OCDE Boone a créé la surprise en affirmant qu’il n'y a pas de corrélation entre les mesures de soutien fiscal nationales et la résilience économique. Autrement dit: toutes les ressources ne sont pas aussi judicieusement affectées…
Dans son nouveau scénario économique, l’OCDE se réjouit des résultats de la recherche d’un vaccin qui pourra mettre fin au cercle vicieux du coronavirus et table sur une reprise définitive à partir du deuxième semestre de l’année prochaine. La consommation différée des ménages pourra avoir un impact positif ou négatif sur la vigueur de la reprise économique, une dimension qui deviendra plus claire une fois que le processus de vaccination battra son plein. Cette année, les taux d’épargne par rapport aux revenus disponibles ont augmenté de 15 à 20% dans des pays comme l’Allemagne, la France, les États-Unis ou le Royaume-Uni.
Cependant, la mise à jour de l’OCDE n’a pas empêché les marchés de fermer l’œil. Depuis début novembre, les investisseurs se basent sur le nouveau scénario d’immunité de masse. Hier, la tendance au “reflation trade” qui en découle s’est encore accrue sans vraie raison apparente, si ce n’est peut-être la nouvelle approche bipartisane américaine en faveur de mesures d’aide d’État supplémentaires d’ici la fin de l’année. Ainsi, les taux à long terme aux États-Unis ont augmenté à 10 points de base sur l’extrémité longue de la courbe, les bourses poursuivent leur course effrénée et le dollar a de nouvelles blessures à panser. Le sommet précédent de EUR/USD 1,2011 a enfin succombé à la pression. Le sommet à 1,2555 de 2018 est le nouveau niveau de référence majeure après un seuil de résistance intermédiaire autour de 1,2102/55.
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC