Les négociations commerciales avec la Chine sur la sellette
@realDonaldTrump remet cela: à travers deux tweets pour le moins explicites, le président américain a troublé le calme de la nuit asiatique. Alors que pas plus tard que la semaine dernière, le ministre des finances Steven Mnuchin qualifiait d'imminent l'accord commercial avec la Chine, Donald Trump veut à présent augmenter les taxes à l'importation existantes sur les biens chinois et introduire de nouvelles barrières douanières pour certains produits qui en sont jusqu'ici exemptés. Donald Trump accuse la Chine de tirer les négociations en longueur pour obtenir un accord plus avantageux.
Les mesures annoncées sonnent le glas de la trêve convenue à la fin de l'année dernière entre Donald Trump et le président chinois Xi Jinping en marge du sommet du G-20 qui se tenait à Buenos Aires. Accord qui avait d'ailleurs été confirmé début mars par les progrès enregistrés dans le cadre des négociations commerciales. Donald Trump commence-t-il vraiment à perdre patience ou faut-il y voir une nouvelle tentative d'impressionner la Chine pour faire monter la pression? Entretemps, la presse abonde en messages contradictoires au sujet des négociations entre la Chine et les États-Unis qui sont censées avoir lieu à Washington mercredi. La délégation chinoise posera-t-elle un lapin aux négociateurs américains?
À en juger par la réaction des marchés ce matin, les tweets du président ont en tout cas pris certains investisseurs à contrepied. Tout le monde s'accordait à dire que les négociations laborieuses finiraient par aboutir à un accord dont tant les États-Unis que la Chine pourraient s'attribuer la victoire morale. Mais voilà que les bourses chinoises viennent de connaître leur session la plus déplorable en plus de 3 ans, essuyant des pertes de 5,5% à 7,5%. En Europe, les dégâts se situent pour l'instant entre 1,5% et 2%. Les obligations d'État américaines et allemandes remplissent leur rôle de port dans la tempête et le prix du baril de Brent est retombé sous les 70$. La réaction du marché des changes témoignait de davantage de circonspection, avec des gains modérés pour le dollar et le yen japonais. Le yuan chinois a pour sa part été sévèrement sanctionné.
Ce matin, les tweets du président Trump éclipsent les statistiques américaines cruciales publiées à la fin de la semaine dernière. Selon le rapport sur l'emploi officiel — les "payrolls" —, pas moins de 263.000 nouveaux emplois ont été créés en avril. Le taux de chômage est retombé contre toute attente à 3,6%, son niveau le plus bas depuis la fin des années '60. Malgré tout, la réaction du marché témoignait d'une extrême prudence. Les salaires ont en effet augmenté moins qu'espéré (0,2% en glissement mensuel et 3,2% en base annuelle) et contrastaient fortement avec la suggestion du président de la Fed, Jerome Powell, selon laquelle l'inflation américaine inférieure à l'objectif de 2% serait un phénomène temporaire. De plus en plus de gouverneurs de la Fed se disent même prêts à abaisser le taux directeur si l'inflation demeure aussi faible ou diminue encore. L'indice ISM reflétant la confiance des entrepreneurs a accusé un recul imprévu de 56,1 à 55 points, son niveau le plus bas depuis août 2017. L'industrie manufacturière (axée sur les exportations) décline depuis un certain temps déjà, mais l'économie de services mue par la demande intérieure laisse à présent elle aussi entrevoir des signes d'hésitation. Une source d'incertitude additionnelle sous la forme d'une nouvelle surenchère de taxes à l'importation est bien la dernière chose dont l'économie (mondiale) ait besoin pour l'instant.