Sur une corde raide
Les banques centrales hongroise et tchèque ont appris des erreurs commises par leurs collègues polonais. La prudence doit être de mise lorsque l’on communique à propos du début (imminent) d’un cycle de baisse des taux. À défaut, la devise en paiera les pots cassés alors que les taux réels sont en hausse dans les grands pays et tous les projets visant à rendre la politique monétaire moins restrictive pourront être jetés à la poubelle.
Mardi, la banque centrale hongroise (MNB) a clôturé la première phase de son processus de normalisation. Elle a abaissé le taux de dépôt exceptionnel – taux créé en octobre de l’année dernière pour mettre un terme à la chute du forint hongrois et qui est, depuis lors, devenu de facto le taux de référence – de 100 points de base pour un cinquième mois consécutif. Ce taux se trouve désormais au même niveau que le taux directeur officiel de 13 % et cessera d’exister après cette semaine.
Dans sa communication au sujet de ses intentions de politique pour l’automne, la MNB évolue sur une corde raide. Nous supposons qu’elle voudra poursuivre sur son élan de baisse des taux, mais avec son taux de base. L’inflation hongroise s’élevait encore à 16,4 % en glissement annuel en août, mais elle devrait être retombée à 7-8 % à la fin de cette année. Le taux directeur hongrois réel deviendra donc (très) rapidement (très) positif. À cela s'ajoutent les risques de baisse de la croissance. Dans ses nouvelles prévisions, la banque centrale table sur une croissance de -0,5-0,5 % cette année et de 3,4 % en 2024 et 2025.
La déclaration de politique et la conférence de presse qui a suivi montrent que la MNB redoutait de faire passer ce message de baisse sur le marché. Le vice-gouverneur, Barnabas Virag, a déclaré que les éventuelles baisses de taux ne seraient quoiqu'il arrive pas effectuées de manière automatique, comme cela a été le cas ces derniers mois avec le taux de dépôt exceptionnel. La MNB veut maintenir une politique suffisamment restrictive et rester prudente dans ses baisses de taux. Les risques de hausse de l'inflation pour 2024 (prévisions de 4-6 %) et 2025 (prévisions de 2,5-3,5 %) sont en balance avec les prévisions plus pessimistes concernant la croissance.
Nous tablons sur une réduction de 50 points de base (à 12,50 %) en octobre. Si tout se passe sans encombre et que le contexte international (aversion pour le risque - volatilité accrue des marchés) le permet, d'autres interventions pourraient suivre en novembre et décembre. Le forint jouera un rôle déterminant. Le cours EUR/HUF flirte actuellement avec des premiers niveaux de résistance dans la zone de 390-395. Un retour au-dessus de 400 risquerait de freiner les velléités d'assouplissement de la MNB.
Hier, la banque centrale tchèque a décidé à l’unanimité de laisser son taux directeur inchangé à 7 %. Le gouverneur, Aleš Michl, s’est par la suite également montré pondéré. Aucune baisse de taux n'était à l'ordre du jour, mais la stratégie visant à rendre la politique moins stricte est en cours d'élaboration. Michl n'a pas voulu associer les mots « baisse de taux » et « 2023 » dans la même phrase, mais chaque réunion devra désormais être suivie de très près. L’inflation de base sous-jacente particulièrement tenace a bénéficié d’une attention un peu plus soutenue que d’habitude. Dans notre scénario de base, nous continuons de penser que la CNB laissera son taux directeur inchangé en novembre (nouvelles prévisions) et qu'elle commencera à l'abaisser en décembre. La couronne tchèque a gagné un peu de terrain (EUR/CZK 24,37). L'évolution naturelle devrait amener le cours vers un niveau de résistance de 24,70/80.
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC