Année 2022 en revue: le marché des actions

Les marchés

Disons-le tout net, 2022 a été une année dévastatrice pour les actions. En devise locale, le Japon (-2%) a largement surperformé le Nasdaq (-30%) et l’indice Hang Seng Tech (-25%). Le Bel20 a enregistré une perte de -14%, contre -17% pour le S&P 500. Même en plein rallye de Saint-Nicolas, oserons-nous affirmer que le phénix renaîtra de ses cendres en 2023?

L’année 2022 était mûre pour une correction

Après les gains boursiers substantiels engrangés au quatrième trimestre de 2021, les marchés risquaient clairement de subir une correction en 2022. De fait, après avoir atteint des sommets excessifs, les actions de valeur ont perdu pied. Les cours de nombreuses matières premières ont corrigé et les prévisions de bénéfices ont été de plus en plus mises en doute. Dès janvier, les ordres de vente se sont envolés, surtout dans les secteurs sensibles aux taux d’intérêt et à la consommation.

Compression des multiples de valorisation

Déjà fragilisé, le sentiment des investisseurs s’est encore détérioré en raison des troubles géopolitiques, notamment en Ukraine et à Taïwan. Mais plus fondamentalement, la hausse persistante de l’inflation et les relèvements de taux d’intérêt associés ont été (et sont toujours) le fil rouge sur les marchés des actions pour 2022. Dans la lutte contre le spectre de l’inflation, la Réserve fédérale a déchaîné les démons des taux, balayant tout incitant à la croissance pour toute l’année – non seulement aux États-Unis, mais aussi au niveau mondial.

La hausse des taux directeurs et des taux du marché, combinée à la pression baissière sur les prévisions de croissance économique, est toujours un mélange toxique pour les actifs à risque. L’année 2022 n’a pas fait exception à la règle: le rapport cours/bénéfice moyen du Stoxx600 est passé de 17,9x début 2021 à 11,9x aujourd’hui. La valorisation du S&P 500 s’est repliée dans une moindre mesure.

Les secteurs vainqueurs: tout sauf ESG

Au classement des 12 derniers mois, les actifs immobiliers européens (-40%), les supermarchés (-32%) et la technologie (-22%) arrivent bons derniers et les entreprises de plateforme chinoises et les entreprises technologiques américaines (surtout celles qui ne sont pas rentables) ont mordu la poussière en chemin. En revanche, les entreprises actives dans l’extraction de matières premières (+8%), les assureurs et les banques (-8%) s’en sont plus ou moins bien sortis. Les gagnants de 2022 ne sont donc guère nombreux et qui plus est, certains regretteront qu’ils relèvent surtout de secteurs opposés aux principes ESG: le pétrole, le gaz, le charbon, le lithium, la défense,…

2022 et 2023, années de mirages?

Les pertes subies en 2022 n’ont pas été linéaires. À la pression sur les cours au premier trimestre a succédé un rallye de printemps, qui s’est prolongé en un rallye estival. Début août, les pertes étaient retombées à 10%… avant de doubler à nouveau à 20-25% début novembre sous la pression des taux d’intérêt, pour finalement diminuer lors d’un rallye de Saint-Nicolas. Une même année boursière aura rarement autant soufflé le chaud et le froid.

Mais le rallye de Saint-Nicolas annonce-t-il vraiment des temps meilleurs à venir? Les investisseurs aspirent ouvertement à une reprise structurelle en 2023, soutenus par l’espoir que le pic de l’inflation soit enfin derrière nous. Cela réduirait en effet la pression sur la cocotte-minute des taux. Mais dans les faits, avant d’en venir là, l’année 2023 s’annonce plutôt stagflationniste, avec une légère récession en vue. Le taux d’inflation ne devrait revenir à la normale que dans les derniers mois de l’année 2023, de sorte qu’une reprise des bénéfices des entreprises n’interviendrait pas avant le quatrième trimestre de 2023.

Une récession avec des marges élevées

Étonnamment, les marges opérationnelles sont restées supérieures à la moyenne pour tous les secteurs économiques jusqu’à présent en 2022 (9% aux États-Unis, 7% en Europe, 7,5% dans le G7), malgré une hausse exponentielle des coûts salariaux et de l’énergie, un marché du travail toujours en pénurie, des chaînes d’approvisionnement grippées qui se démêlent lentement et une multitude de crises géopolitiques. C’est notamment dû à une gestion proactive, des bilans robustes, des réserves d’épargne élevées et diverses aides publiques.

Les marges élevées ont contraint les analystes à ne revoir à la baisse les prévisions bénéficiaires que dans les derniers mois de 2022. Début juillet 2022, le S&P 500 tablait encore sur une croissance bénéficiaire de 9% en base annuelle pour le quatrième trimestre 2022. Les prévisions sont entre-temps retombées à -1%, mais même ce chiffre est loin de rendre justice au scénario de récession ou de dépression annoncé par les nombreux avis de tempête sur le marché des actions. Une chose est sûre, le beau temps n’est pas encore pour début 2023.

Mauvaises pioches

En 2022, le pouvoir de fixation des prix aura été le grand joker des entreprises. C’est ce qui leur a permis de répercuter la pression inflationniste sur les consommateurs pendant une durée étonnamment longue. Mais ce pouvoir a ses limites, surtout en période de récession. En 2023, le sentiment sur les marchés des actions dépendra fortement du calendrier de la normalisation de l’inflation. De plus, les investisseurs devront se faire à des taux de croissance très faible, une plus grande tendance à l’épargne des consommateurs et une hausse structurelle des coûts opérationnels. Avant de pouvoir renaître de ses cendres, le phénix n’en a peut-être pas fini de brûler.

Tom Simonts, Senior Financial Economist KBC Group

Aperçu des indices boursiers en 2022 (en % en base annuelle, en devise locale)

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Ce document a été préparé par le desk KBC – Economic Markets et n'a pas été rédigé par le département Research.  Le desk est composé de Mathias Van der Jeugt, Peter Wuyts en Mathias Janssens, analysts  à KBC Bank N.V., entreprise réglementée par l'Autorité des marchés et des services financiers (FSMA). Ces recommandations de marché sont le résultat d'une analyse qualitative, dans laquelle il y a place pour l'expérience passée et les évaluations personnelles. Les avis sont basés sur les conditions actuelles du marché et peuvent être modifiés à tout moment. Les contributions les plus importantes proviennent de données accessibles au public, de nouvelles financières, de la politique économique et monétaire et d'analyses techniques actuelles. Le desk desk KBC – Economic Markets a fait des efforts raisonnables pour obtenir ces informations de sources qu'il considère comme fiables, mais le contenu de ce document a été préparé sans faire une analyse substantielle de ces sources. Aucune évaluation n'a été faite pour déterminer si ces informations sont appropriées ou non pour un investisseur particulier. Les avis sont nos avis actuels à la date indiquée sur ce document et peuvent différer des recommandations précédentes en raison de l'évolution des conditions du marché. Les auteurs ne garantissent pas l'exactitude, l'exhaustivité ou la valeur (commerciale ou autre) de ce document. De même, les auteurs ne sont pas responsables envers quiconque reçoit ce résumé de toute perte ou dommage (qu'il s'agisse d'un délit (y compris la négligence), d'une rupture de contrat, d'une violation de la loi ou d'autres obligations) résultant d'un acte ou d'une omission sur la base de ce contenu, ou de toute réclamation contre les auteurs concernant le contenu ou les informations contenues dans ce document. Toutes les opinions exprimées dans le présent document reflètent le jugement au moment de la préparation de l'examen et sont susceptibles d'être modifiées sans préavis. Étant donné la nature de cet avis (lié à la monnaie et aux taux d'intérêt), il n'est généralement pas de nature spécifique.   Il n'y a donc aucune référence à un quelconque contrat de financement d'entreprise et il n'y a donc pas de vue d'ensemble sur 12 mois basée sur les différents avis. Ce document n'est valable que pour une période très limitée, en raison de l'évolution rapide des conditions du marché.

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