Rebond temporaire de l’euro
L’euro s’est repris depuis la réunion de la BCE de la semaine dernière. La paire de devises EUR/USD est passée de la parité (ou en dessous) à 1,02. Aujourd’hui, elle tente pour la deuxième fois consécutive de sortir de la tendance baissière observée depuis février. Une rupture ouvrirait la voie vers la zone cruciale de 1,0350. Cela ne se fera pas sans mal.
La confiance est difficile à obtenir, mais tellement facile à perdre. La banque centrale européenne a perdu une grande partie de sa crédibilité au premier semestre en affichant une attitude laxiste face à l’inflation. L’euro en a payé les frais. Les relèvements de taux de 50 points de base en juillet et de 75 points de base en septembre ont permis de redresser la barre. D'autant plus que, depuis le resserrement historique de la semaine passée, les membres de la BCE plaident tous en faveur d’une poursuite d'un cycle de taux agressif. C’est désormais l’intention de la BCE. Nous ne répéterons jamais assez la nouvelle doctrine de la banque centrale : les répercussions économiques d’une politique monétaire stricte ne pèsent pas lourd face aux avantages à long terme de la stabilité des prix. À cet égard, le pic du taux directeur anticipé par le marché (2,5 % au milieu de l’année prochaine) nous semble encore trop prudent.
L’euro est également soutenu par la baisse des prix du gaz. Le rebond du mois d’août est désormais totalement effacé. Les prix du gaz européen se trouvent aujourd’hui à leurs niveaux les plus bas depuis la mi-juillet. Aucune solution concrète n'est encore sortie du sommet des ministres européens de l’Énergie qui s'est tenu vendredi dernier, mais un plan d’intervention est en cours d’élaboration. Demain, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, donnera son discours annuel sur l'état de l'Union, le moment idéal pour présenter des initiatives.
Enfin, le recul des prix du gaz et l'avancée de l’armée ukrainienne sur le terrain créent un climat d'euphorie sur les marchés boursiers. Depuis vendredi dernier, l’EuroStoxx 50 a gagné quelque 4,5 %.
Du côté dollar de la comparaison, nous nous trouvons aujourd'hui dans une phase d'entre-deux en attendant la réunion de politique de la Fed. L'occasion de prendre ses bénéfices après les hausses de cours records. Un troisième relèvement consécutif de 75 points de base est anticipé. La principale question est de savoir à quoi ressembleront les nouvelles prévisions d’inflation et de taux directeur. Cet après-midi, les chiffres de l’inflation aux États-Unis devraient en principe enregistrer une deuxième baisse consécutive en glissement annuel, en raison du recul des prix de l’essence. L'inflation sous-jacente reste en revanche aussi orientée à la hausse aux États-Unis. Raison pour laquelle nous pensons également que le pic de taux directeur attendu pour les États-Unis (4 %) est plutôt prudent.
Le cours EUR/USD bénéficie d'un bol d'oxygène sur le court terme. Nous craignons toutefois qu'il ne pourra pas aller au-delà de 1,0350. L'ambiance qui s'est créée autour de l'annonce du plan d’intervention européen donne un faux sentiment de sécurité avant un hiver qui s'annonce tout de même très compliqué en Europe. En outre, nous pensons que les taux resteront orientés à la hausse, portés par des taux réels plus élevés. Cela va rarement de pair avec de belles performances boursières. Toutes choses étant égales par ailleurs, nous tablons sur un retour en dessous de la parité après la correction actuelle.
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC