La MNB persiste et signe
En abaissant son taux directeur de 75 points de base en octobre, la banque nationale hongroise (MNB) a pris un risque. L’abaissement a été plus important que ce que le marché anticipait, mais fait suite à une désinflation un peu plus forte que prévu. Les spéculations sont immédiatement allées bon train comme quoi Budapest voudrait exploiter jusqu’au bout la baisse de la pression sur les prix. Après une nouvelle surprise positive au niveau du taux d’inflation d’octobre (de 12,2% à 9,9%), de nombreux analystes, nous y compris, estimaient que la MNB poursuivrait le cycle de normalisation en novembre (et en décembre) au rythme de 100 pb.
Les décideurs politiques ont vu les choses autrement. Quelques jours après le rapport de marché du mardi précédent, un certain Zsolt Kuti est intervenu. En tant que conseiller influent de l’organe décisionnel, Kuti a mis en garde contre un assouplissement trop agressif, arguant qu’il était important d’atteindre à temps l’objectif d’inflation (3% ± 1 ppt). Ensuite, le numéro deux de la MNB a pris la parole: le vice-gouverneur Virag a affirmé sans hésitation que l’on s’en tiendrait à 75 points de base. Hier, la banque centrale a tenu parole et abaissé le taux directeur à 11,5%. Elle ne s’est pas laissé tenter par le fait que tant l’inflation générale que l’inflation de base (10,9%) sont tombées dans la partie basse de la fourchette des prévisions (de septembre). Le nouvel étalon de prédilection, qui mesure la dynamique trimestrielle annualisée de l’inflation de base, est passé de <4% à <3%. La banque centrale s’attend à atteindre son objectif d’inflation en 2025. Ce processus est soutenu par un taux directeur réel positif (= corrigé de l’inflation): en ajoutant ce point à sa déclaration, la MNB montre officiellement qu’il est important pour elle que ce taux reste positif.
Cette approche prudente intervient dans un contexte international fragile, où le sentiment peut se détériorer très vite. Dans de telles circonstances, les devises comme le forint hongrois sont rapidement prises pour cible par le marché, un scénario dont la banque centrale se méfie. Nul n’aura oublié les turbulences traversées par le HUF en 2022, bien que la devise soit aujourd’hui en meilleure position, entre autres grâce à l’amélioration considérable de la balance commerciale.
D’après les dernières communications (dont celle d’hier), nous nous attendons à ce que les réunions de politique de décembre, janvier et février se soldent également par des abaissements de taux de 75 pb. Cela coïncide avec un taux directeur de <11% à la fin de cette année et <10% en février, que Virag a mis en avant la semaine dernière et répété hier. L’inflation devrait s’établir à 7-8% à la fin de l’année, pour fondre en deçà de 5% au printemps. Ce scénario implique un ralentissement logique, mais clairement attendu du processus de désinflation. Nous partons donc du principe que la banque centrale modérera le rythme de la normalisation de 75 à 50 pb en mars. Cela lui permettra de conserver un taux d’intérêt réel suffisamment positif pour assurer un filet de sécurité au forint. Outre l’évolution du taux d’inflation, cet aspect restera un facteur clé du processus décisionnel de la MNB. Le cours EUR/HUF a récemment trouvé un équilibre proche de 380. Pour ouvrir la perspective d’un assouplissement plus agressif, il faudrait que le forint se renforce (à demeure) en dessous de EUR/HUF 370.