La CNB bat le fer tant qu'il est chaud
Mardi, la Hongrie a brisé le statu quo monétaire sur le continent européen. Le pays est le premier État membre de l’UE à s'être lancé dans un cycle de resserrement, avec un relèvement de taux de 30 points de base. Comme nous l’avions indiqué dans notre numéro d'’hier, il n'allait pas falloir attendre longtemps avant qu'un autre pays franchisse aussi ce cap. Au final, il n'aura fallu attendre qu'un peu plus de 24 heures.
La banque centrale tchèque (CNB) a emboîté le pas de la MNB et a, comme prévu, rehaussé son taux directeur de 25 points de base, à 0,50 %. Deux choses sont frappantes. Un : le relèvement de taux a été opéré malgré l’absence de nouvelles prévisions de croissance et d’inflation. Et deux : les motifs soulignent une fois de plus le flair orthodoxe de la CNB. Les dernières prévisions datent de mai. Établies à l'époque dans un contexte d’incertitude, la banque estime tout de même qu'elles reflètent dans les grandes lignes la réalité. En fait, la situation est même meilleure que prévu, avec un recul de la croissance nettement moins fort que redouté au premier trimestre. Après avoir été sous le joug des mesures de lutte contre le coronavirus, l'économie va probablement enclencher la vitesse supérieure au prochain trimestre. Le marché de l’emploi tchèque résiste bien. La part des chômeurs est retombée sous les niveaux attendus en avril et mai. La pression salariale a évolué sans surprise. Un constat qui nous amène à l’inflation. À 2,9 % en glissement annuel en mai, celle-ci se situe à un souffle du plafond autorisé de 3 % (objectif de 2 % avec une marge de tolérance symétrique de 1 %). La CNB se méfie des risques inflationnistes. Pour l’année prochaine, elle table sur un retour en direction de 2 %, grâce à la normalisation de la politique. Rusnok et ses collègues n'excluent pas une résurgence de la pandémie (en automne, par exemple), mais ils estiment qu'avec la campagne de vaccination, on devrait pouvoir éviter de nouvelles mesures de restriction dommageables pour l'économie. Autrement dit, la pandémie est terminée et cela s’est produit plus rapidement que ne le pensait la CNB.
Tout comme en Hongrie, ce resserrement ne sera pas le seul. La CNB laisse entendre que les taux pourraient encore augmenter au second semestre. Dans ses explications, le gouverneur Rusnok a pointé la manière avec laquelle les prévisions de taux du mois de mai se vérifiaient à l'heure actuelle. Le marché a interprété cela comme une "forward guidance inconditionnelle". Le gouverneur a en outre suggéré que la banque centrale pourrait en principe ajuster le tir à chaque réunion, avec ou sans rapport sur l’inflation. Un précédent clair a déjà eu lieu hier. Le message est limpide : la CNB veut battre le fer tant qu'il est chaud. Nous n’excluons pas un nouveau resserrement en août et un troisième plus tard dans l’année. Le taux devrait terminer 2021 à 1 %. Le marché a adapté sa vision en conséquence. Les taux (swap) à court terme tchèques ont grimpé de 20 points de base hier et aujourd’hui. La couronne tchèque s’est raffermie, à moins de EUR/CZK 25,4. Nous tenons le niveau de EUR/CZK 25,27 à l'œil. Une rupture sous ce seuil est possible. Le sommet de 2020 (pour la CZK) de 24,76 serait alors en vue. Idéalement, cela se fera progressivement. Une appréciation trop rapide de la CZK est en effet quasiment le seul contre-argument auquel la banque centrale est sensible concernant l’inflation.