Un "buzzer beater" envoie le dollar en prolongations
La surprise est de taille. IHS Markit a publié les PMI pour les États-Unis pendant les heures d'ouverture des marchés américains. Le contraste avec la sinistrose ambiante en Europe est énorme. Le PMI américain général est ainsi passé de 56,3 à 57,9, son niveau le plus élevé en plus de cinq ans, et reste donc du bon côté du seuil de 50, contrairement à l'indicateur pour la zone euro (45,1).
Tant les indicateurs de l'industrie manufacturière (56,7) que ceux du secteur des services (57,7) ont grimpé à des sommets qui n'avaient plus été atteints depuis plusieurs années. Et les chiffres détaillés sont également tous positifs. En plus de l'accélération de l'activité, les entreprises ont également, selon les PMI, recruté à un rythme record afin de pouvoir résorber les retards accumulés dans leurs carnets de commandes et répondre aux très nombreuses nouvelles commandes. La pénurie de main-d'œuvre (qualifiée) et de matériel (à cause des perturbations dans les chaînes de production mondiales) provoque même une pression haussière sur les salaires et les prix. Enfin, les directeurs d'achat interrogés se montrent aussi particulièrement optimistes pour l'avenir. Outre les avancées en matière de vaccination, le résultat des élections présidentielles a fortement pesé dans la balance. Nous sommes néanmoins contraints d'ajouter qu'il faut s'attendre à une nouvelle dégradation des chiffres en novembre. Contrairement à ce que l'on observe en Europe, les courbes des contaminations aux États-Unis n'ont pas encore atteint leur sommet et certaines autorités locales sont seulement en train de mettre timidement en place des mesures de restriction. Cela n'aura quoi qu'il en soit qu'un effet provisoire, étant donné les perspectives d'une vaccination à grande échelle et de nouvelles mesures de relance budgétaire.
Concernant la relance budgétaire, le président élu, Joe Biden, vient d'envoyer un signal fort en nommant l'ancienne présidente de la Fed, Janet Yellen, au poste de secrétaire au Trésor. Par ailleurs, le président Trump a, hier, enfin donné son feu vert au processus de transition, sans toutefois encore reconnaître sa défaite. Personne mieux que Yellen ne peut comprendre l'appel lancé par Powell pour que la politique budgétaire joue un rôle central dans la reprise économique. La politique monétaire doit surtout jouer un rôle de soutien. Yellen et Powell ont autrefois siégé ensemble au directoire de la banque centrale américaine et se comprennent bien l'un l'autre.
Sur les marchés, la publication des PMI a profité au dollar. Le mouvement est certes en partie dû à des facteurs techniques après l'énième sauvetage de dernière minute d'importants niveaux de support (pour la monnaie US). Nous pensons notamment à la zone de 1,19 pour le cours EUR/USD, à la zone de 92 pour le billet vert pondéré des échanges commerciaux ou au cap de 104 pour la paire USD/JPY. Le fait que le dollar se trouve de nouveau sur la défensive après le "buzzer beater" d'hier en dit par conséquent beaucoup sur le sentiment qui règne autour de la monnaie américaine. Selon nous, ce n'est probablement qu'une question de temps avant que des ruptures techniques surviennent. Les taux américains ont très peu augmenté après l'officialisation du processus de transition et la nomination de Yellen et les futures boursiers ont renoué avec des gains.
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC