“Perpetuum mobile”: les échéances du Brexit
À la fin de la semaine dernière et ce week-end, nous avons eu beaucoup de nouvelles politiques en provenance du Royaume-Uni. Le premier ministre Johnson s’efforce depuis un certain temps déjà de donner de l’élan à son gouvernement/sa politique. Mais la crise du coronavirus touche plus durement l’économie britannique que la plupart des autres économies développées. Et il n’y a pas que l’aspect économique: d’un point de vue politique aussi, le virus s’est avéré difficile à gérer et le gouvernement conservateur n’a jamais pu convertir sa victoire électorale en décembre 2019 en une politique efficace. Un “remake” devient donc urgent pour Johnson. La semaine dernière, certains de ses proches collaborateurs, dont son bras droit, le stratège du Brexit Dominic Cummings, ont démissionné. La pression qui pèse sur le premier ministre pour montrer qu’il peut tenir solidement la barre politique n’a fait qu’augmenter. Or le covid-19 continue à entraver ses plans de relance et après un contact avec un parlementaire contaminé, Johnson doit à présent retourner en quarantaine. Les grandes opérations de relations publiques devront donc être remises à plus tard; cette semaine, il voulait par exemple annoncer ses projets pour rendre l’économie plus verte. Au lieu de cela, la relance politico-économique attendra. Mais tout n’est pas perdu: cette semaine, il y aura peut-être encore des nouvelles sur le Brexit.
Dans une série d’entretiens ce week-end, le ministre irlandais des Affaires étrangères Coveney a insisté sur le fait que le moment était vraiment venu d’aboutir à un résultat. Côté britannique, le secrétaire d’État Eustice et le négociateur Frost ont renchéri. Cependant, ces déclarations ont à nouveau été faites au moment où une autre date butoir informelle pour la conclusion d’un accord expirait, sans tambour ni trompettes. Le 15 novembre était pour ainsi dire la “dernière” limite pour qu’un accord puisse être approuvé formellement à temps par toutes les parties concernées (notamment les parlements). À présent, d’autres dates “limites” sont à nouveau invoquées: aujourd’hui, le FT indique par exemple qu’il resterait encore du temps pour une approbation lors d’une séance au Parlement européen le… 14 décembre. Ou un peu plus tard. La bonne nouvelle est que les négociateurs auraient déjà préparé des centaines de pages de textes techniques; les tarifs commerciaux et les quotas seront probablement résolus. La moins bonne nouvelle, c’est qu’il y a peu d’avancées en matière de principes et de dossiers symboliques comme la pêche, les “conditions de concurrence loyale” (level playing field) pour les entreprises et le mécanisme de résolution des litiges éventuels.
S’agira-t-il donc d’une semaine importante pour la livre? C’est possible. Un accord conclu maintenant, voire autour du 1er décembre, pourrait toujours entraîner un “reset ponctuel” positif pour la livre. Ces dernières semaines et ces derniers mois, EUR/GBP 0,8865 s’est d’ores et déjà avéré un niveau de résistance solide. Les développements actuels au sein du paysage politique britannique (l’on entend à peine Johnson dans le débat sur le Brexit) donnent à penser que les décideurs britanniques ont bien conscience qu’outre et après le Brexit, une tâche socioéconomique au moins aussi dantesque les attend. La Banque d’Angleterre aura un rôle à jouer à cet égard. Mais tant qu’il n’y aura pas de signes clairs dans le sens d’une collaboration entre la politique fiscale et la politique monétaire pour mettre l’économie britannique sur la voie d’un rattrapage, nous restons prudents quant au potentiel de relance de la livre – même si un accord de dernière minute se réalise.