Chronique d'un départ annoncé

Les marchés

Bien qu'elle ait prouvé avoir plus de vies qu'un chat au cours de ces dernières années, les jours de la Première ministre britannique Theresa May semblent désormais bel et bien comptés, avec une humiliation à son comble en fin de semaine. Mardi, elle a déjà un reçu un coup après la présentation du projet modifié d'accord sur le Brexit. Malgré la promesse d'un second référendum et une proposition de maintien temporaire dans une union douanière, May a reçu une fin de non recevoir de la part tant du leader de l'opposition Jeremy Corbyn que de ses alliés nord-irlandais du DUP et même de certains poids lourds de son propre parti conservateur. Son projet de soumettre pour la quatrième fois sa (nouvelle) proposition au vote des députés britanniques en juin aura donc fait long feu. May avait promis qu'elle tirerait sa révérence après ce vote.

D'après les médias britanniques, le règne de Theresa May pourrait prendre fin dès demain. Celle-ci doit en effet rencontrer le chef du Comité 1922, qui réunit l’ensemble des députés conservateurs ne siégeant pas au gouvernement. Graham Brady profitera de cette occasion pour demander poliment à la Première ministre de faire un pas de côté. Une demande qu'il formulera non seulement au nom de ce groupe de parlementaires, mais également au nom de quasiment tous les membres du parti. Dans le pire des cas, le comité exécutif du Comité 1922 pourrait décider de modifier les règles régissant les motions de censure déposées à l'encontre d'un Premier ministre. Selon les règles actuelles, les Tories devront attendre la fin de l'année avant de pouvoir présenter une nouvelle motion, six mois après le rejet de la précédente.

La troisième gifle qui attend May est une déroute historique aux élections européennes. Le simple fait de participer peut déjà en soi être considéré comme une défaite, mais les conservateurs risquent de ne même pas atteindre la barre des 10%. Le parti pro-Brexit créé il y a peu par Nigel Farage caracole en tête des sondages, avec 34% des intentions de vote. L'autre grand parti traditionnel, le Labour, tourne autour des 15%. Au début du mois, les électeurs avaient déjà fortement sanctionné les Tories lors des élections locales.

Cap sur 0,91 pour l'EUR/GBP

La lutte pour prendre les rênes du parti conservateur a donc commencé. La probabilité qu'un nouveau leader puisse être rapidement désigné est faible, d'autant plus que les vacances d'été approchent. Le congrès du parti aura lieu en fin septembre. Or, le délai entre ce congrès et l'actuelle date butoir du Brexit (31 octobre) est court. Le marché craint donc que le risque de Brexit reprenne son caractère binaire: pas de Brexit ou un Brexit sans accord. Dans l'état actuel des choses, toutes les autres solutions intermédiaires paraissent peu envisageables, surtout si c'est un "hard brexiteer" qui succède à May. La livre sterling est la principale victime de cette situation. Le marché a commencé à revoir sa copie après l'annonce par le Labour de la rupture des discussions avec le gouvernement. La monnaie s'est donc repliée, après avoir testé en vain le niveau de support de 0,85. Depuis, le cours tourne autour d'un premier niveau de résistance important de 0,8840. L'été risque, selon nous, d'être très agité pour la livre. Nous nous attendons d'ailleurs à une nouvelle hausse de l'EUR/GBP, en direction de 0,91 Le recul généralisé du sentiment vis-à-vis du risque joue également en défaveur de la monnaie britannique.
 

EUR/GBP: cap sur 0,91 au cours d'un été chahuté?

Bron: Bloomberg

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