Des politiques claires sont essentielles pour accélérer la reprise économique
Le point bas de la crise économique du Covid-19 est derrière nous. L’actuelle résurgence mondiale des infections n’a pas le pouvoir de causer les mêmes dommages économiques qu’au premier semestre 2020. Des mesures gouvernementales plus modérées, mais aussi une résilience remarquablement forte chez les consommateurs et les entreprises, garantissent que la reprise sera durable. Pourtant, il est trop tôt pour applaudir à la victoire. La reprise est fragile et prendra donc beaucoup de temps, non seulement en raison de la résurgence du virus, mais aussi parce que la confiance dans l’économie est actuellement chancelante. Cette confiance est minée par l’absence de politiques claires. Malgré une forte impulsion monétaire et budgétaire, la reprise risque d’être lente.
Le monde de l’après-coronavirus
La Covid a surpris tant par l’ampleur que par la rapidité de son impact économique. Les banques centrales ont réagi remarquablement vite, grâce à leur expérience récente de la crise financière et de la crise de la dette européenne. La gestion des crises fait aujourd’hui partie de l’ADN de chaque banquier central. Cette dernière ne s’applique pas à tous les décideurs politiques. Confrontés à la première pandémie depuis des décennies, et inspirés par les réactions d’autres pays (en particulier la Chine) et les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (entre autres), de nombreux pays ont opté pour une approche particulièrement sévère : des confinements qui ont de facto paralysé l’activité économique dans une large mesure. Lorsque l’impact économique désastreux de ces mesures est devenu évident (parmi de nombreux autres effets secondaires), de nombreux gouvernements se sont précipités pour réduire les mesures de confinement, ouvrant la porte à de nouvelles épidémies de virus. Depuis lors, les décideurs politiques tentent de trouver un équilibre entre la prévention des risques sanitaires, d’une part, et le maintien de la reprise économique et du bien-être mental des jeunes et des personnes âgées, d’autre part, en mettant de plus en plus l’accent sur le retour à la « vie normale » d’antan.
La question est de savoir si cette « vie normale » reviendra tôt ou tard. Les actions politiques inattendues et changeantes affectent fondamentalement la confiance des citoyens et des entreprises. Les indicateurs de confiance se sont effondrés au début de la crise, mais se sont redressés de manière tout aussi spectaculaire lorsque les mesures de confinement drastiques ont pris fin et que la reprise économique s’est installée simultanément. Dans certains pays, nous constatons aujourd’hui un rétablissement complet des indicateurs de confiance, tandis que dans d’autres, la reprise est inachevée mais néanmoins de grande ampleur. Il est toutefois illusoire de penser que la confiance est pleinement revenue. Une estimation plus réaliste est que les citoyens et les entreprises sont incertains quant à l’avenir et seront donc prudents dans leur consommation et leurs investissements. Cela crée un cercle vicieux désastreux. L’économie a besoin de confiance pour se redresser structurellement, mais la confiance ne peut se rétablir que dans un environnement économique favorable. Pour briser ce cercle, une politique résolue est nécessaire. Et c’est là que le bât blesse…
Le stress des choix
Après tout, les décideurs politiques sont réticents à opter pour une stratégie post-coronavirus spécifique, parfois pour des raisons politiques, mais plus encore en raison de nombreuses considérations différentes et justifiées. Il n’est pas facile d’élaborer une politique équilibrée et il est tout à fait compréhensible que les bons décideurs politiques hésitent dans leurs décisions. Cependant, cette hésitation contribue de manière significative à l’incertitude et donc au ralentissement de la reprise économique. La confiance est le fondement essentiel de la reprise économique, notamment pour la création de nouveaux emplois, de nouveaux investissements et une forte croissance de la consommation. Les politiques visant à renforcer la confiance, même indépendamment de leur contenu précis, sont ce dont nous avons besoin dans un avenir proche.
Brexit is back
Il est donc essentiel d’élaborer des politiques claires dans un avenir proche. Cela s’applique non seulement aux questions liées au Covid-19, mais à tous les domaines politiques. Par exemple, le Brexit-chaos est en train de reprendre. La menace de Boris Johnson, en l’absence d’un accord avec l’UE d’ici le 15 octobre, d’opter pour un Brexit sans accord, provoque une forte tension à la table des négociations. Néanmoins, nous pensons que cette thérapie de choc contribuera à une solution plutôt qu’à poser un problème. De plus, les dommages économiques d’un Brexit dur seraient limités par rapport à l’impact dramatique de la crise du Covid-19. Nos simulations montrent que dans les circonstances actuelles, un « hard Brexit » coûterait entre 0,5 % et 2 % de croissance aux États membres de l’UE, l’impact négatif le plus important se faisant sentir en Irlande, le principal partenaire commercial européen du Royaume-Uni. Bien entendu, il est préférable d’éviter un tel choc supplémentaire et un tel retard dans la reprise. Mais les dommages d’une incertitude permanente de type « Brexit » peuvent être plus importants que ceux d’un « no deal Brexit ». C’est pourquoi il est temps de tourner la page de l’échec. Les négociations Brexit sans gouvernail ont assez duré.
En raison du risque que les politiques au niveau national et européen n’apportent pas la clarté nécessaire, nous restons prudents dans nos prévisions concernant la croissance économique future de la zone euro. Une nouvelle reprise est inscrite dans les étoiles, mais nous restons prudents dans notre optimisme. Concrètement, le PIB réel de la zone euro devrait se contracter de 8,3 % en 2020. La reprise en 2021 sera limitée à 5,2 %, il faudra donc attendre 2023 pour que l’économie européenne se remette complètement du choc du coronavirus. Ce schéma de croissance annuel suppose une croissance trimestrielle de 6,7 % au troisième trimestre 2020 et de 4,5 % au quatrième trimestre. En termes absolus, cela semble être un avenir radieux, mais il en faut plus pour revendiquer la victoire économique sur le virus.