Perspectives Économiques février 2019

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À la une

  • Contre toute attente, les facteurs temporaires à l’origine du ralentissement de la croissance éco-nomique de la zone euro au troisième trimestre de 2018 persistent. L’intégralité du deuxième se-mestre de l’exercice aura finalement été décevante et rien n’exclut que le début de 2019 le soit aussi. Cette faiblesse se reflétera dans les chiffres du nouvel exercice, ce qui ne signifie toutefois pas que les perspectives soient uniformément sombres. Plusieurs éléments permettent d’espérer une légère accélération de la croissance au deuxième semestre de l’année. La révision à la baisse (de 1,5% à 1,1%) des pronostics relatifs à l’évolution du PIB réel de la zone euro en 2019 est le re-flet du ralentissement récent. Nous maintenons, pour 2020, nos prévisions de croissance à 1,4%.
  • L’activité économique américaine demeure vigoureuse, mais son plus haut niveau pourrait être derrière elle, auquel cas un ralentissement serait inévitable. Il faut voir là le résultat de la guerre commerciale, du ralentissement de la croissance de l’économie mondiale et de la maturité du cycle économique américain. C’est la raison pour laquelle nous avons revu nos prévisions de croissance, de 2,5% à 2,3% pour 2019 et de 2,0% à 1,8% pour 2020.
  • Le ralentissement de la croissance économique et la faiblesse persistante de l’inflation incitent les Banques centrales des principales économies à se montrer prudentes. Tant la Fed que la BCE at-tendent de voir comment l’économie va évoluer pour décider de mettre en œuvre ou, au contrai-re, de modifier, leur politique stratégique. Selon toute vraisemblance, la Réserve fédérale améri-caine ne devrait relever son taux directeur qu’à une seule reprise cette année. Quant à la BCE, nous persistons à croire que c’est en fin d’année qu’elle va commencer à procéder à des relè-vements progressifs. La faiblesse des taux courts et la quête de «havres sûrs» par les investisseurs continueront à peser sur les taux longs.

Contexte international

Ralentissement de la croissance internationale

Plusieurs organismes et spécialistes internationaux ont abaissé leurs chiffres prévisionnels relatifs à l’évolution de l’économie mondiale en 2019 et au-delà - ce qui, compte tenu des incertitudes qui règnent partout dans le monde et de leur influence sur la confiance des entrepreneurs, n’est guère surprenant. Les premiers signes de ralentissement de la croissance sont apparus en 2018 et se prolongent en 2019. Même si certains d’entre eux s’expliquent par des facteurs temporaires, ils pèsent lourdement sur la croissance prévisionnelle de 2019. Il n’en reste pas moins probable que la croissance économique européenne enregistrera un certain redressement plus tard dans l’année.

Ralentissement de la croissance de la zone euro

Contre toute attente, les facteurs temporaires à l’origine du ralentissement de la croissance économique de la zone euro au troisième trimestre de 2018 persistent. L’intégralité du deuxième semestre de l’exercice aura finalement été décevante. Cette faiblesse se reflétera dans les chiffres du nouvel exercice.

Un certain nombre de facteurs, tant externes qu’internes, sont en cause. Le conflit commercial qui oppose les États-Unis à la Chine a affaibli le contexte international. Bien que les relèvements des tarifs douaniers ne la visent pas directement, l’Union européenne a de quoi être inquiète et ce n’est pas la menace américaine d’augmenter les tarifs à l’importation des voitures et des pièces détachées qui va la rassurer. Ces facteurs contribuent à affaiblir l’industrie manufacturière et les secteurs des marchandises traitées à l’international du monde entier, une tendance qui pèse sur la confiance des entrepreneurs.

L’on a bien constaté une légère amélioration de la confiance des entrepreneurs de l’industrie manufacturière espagnole et française en janvier, mais il est trop tôt pour parler d’un revirement massif de la zone euro, d’autant que la confiance de leurs homologues allemands s’affaiblit à nouveau. Même s’il reste supérieur à sa moyenne à long terme, l’indicateur de la Commission européenne à propos du sentiment économique a lui aussi nettement reculé depuis le début de l’exercice 2018. D’une manière générale, les indicateurs avancés sont le reflet d’un démarrage plutôt mou de l’économie en 2019.

L’image que renvoient les indicateurs «doux» est confirmée par les indicateurs d’activité. Les exportations de la zone euro ont ralenti au deuxième semestre de 2018. Les importations aussi, mais dans une mesure moindre. La contribution des exportations nettes à la croissance a par conséquent été négative au troisième trimestre et selon toute vraisemblance, au quatrième trimestre également.

Ont également contribué au ralentissement de la croissance de la zone, un certain nombre de facteurs domestiques et de situations propres aux différents pays membres. L’industrie automobile a dans un premier temps éprouvé des difficultés à se conformer aux nouvelles normes d’émission et donc, à obtenir les certificats requis. La production en a souffert. Les nouvelles procédures de test ont compliqué les choses partout dans l’Union et tout particulièrement, en Allemagne. La production automobile, qui avait marqué le pas au troisième trimestre, ne s’est que partiellement rétablie. Ces problèmes se sont étendus aux fabricants de pièces détachées également. Enfin, ils ont pesé sur la consommation des ménages au troisième trimestre.

Mais les difficultés auxquelles est confrontée l’industrie manufacturière allemande ne s'arrêtent pas au secteur automobile, tant s’en faut. Cela fait plusieurs mois que l’intégralité de l’industrie allemande déçoit (figure 1). Axée sur l’exportation, l’économie allemande pourrait pâtir du ralentissement de l’économie mondiale.

Figure 1: Résultats décevants de l’industrie manufacturière allemande (en glissement mensuel, en %)

Source: KBC Economic Research d'après des données de Destatis Statistisches Bundesambt 

Les tensions sociales en France comptent parmi les facteurs domestiques qui pèsent sur la croissance économique de la zone euro. Dans l’Hexagone, la confiance aussi bien des producteurs que des consommateurs a véritablement chuté au quatrième trimestre de 2018. D’après les chiffres provisoires, le phénomène a ramené à zéro la contribution de la consommation des ménages à la croissance au quatrième trimestre. Les mesures fiscales destinées à soutenir le pouvoir d’achat, entrées en vigueur dès avant qu’une partie de la population ne descende dans la rue, ont manqué leur cible.

La politique budgétaire italienne ne contribue pas, elle non plus, à la croissance de la zone euro. La croissance de l’économie italienne avait initialement subi les effets du ralentissement du commerce international; mais la demande intérieure marque désormais, elle aussi, le pas. Les incertitudes qui entourent la politique budgétaire plombent les investissements. Résultat: l’Italie cumule désormais deux trimestres consécutifs de croissance négative, ce qui techniquement correspond à une récession.

Très faible au troisième trimestre, la croissance réelle du PIB de la zone euro ne s’est que partiellement redressée au cours des trois mois qui ont suivi. D’après les premières estimations, elle s’élèverait à 0,2% (d’un trimestre à l’autre), ce qui est à peine plus qu’au troisième trimestre (figure 2). Certaines des causes du ralentissement évoquées ci-dessus ne sont que temporaires. Reste qu’elles tardent à disparaître.

Figuur 2 - Beperkt groeiherstel in de eurozone in het vierde kwartaal (reële bpp, kwartaal-op-kwartaal wijziging, in %)

Source: KBC Economics d'après des chiffres d'Eurostat 

La principale déception résulte du ralentissement, pour le deuxième trimestre d’affilée, de l’économie italienne. L’Espagne, en revanche, surprend agréablement. La croissance s’est accélérée encore, alors que les trimestres précédents étaient déjà satisfaisants. Malgré les troubles sociaux et leur incidence sur la consommation des ménages, la croissance (en glissement trimestriel) de l’économie française s’établit à 0,3%. Après le léger recul enregistré au troisième trimestre, l’Allemagne piétine au quatrième trimestre (0% de croissance d’un trimestre à l’autre).

Ces chiffres montrent à quel point certaines économies se maintiennent, malgré un contexte international fait de risques et d’incertitudes. Mais ils prouvent aussi l’ordre extrêmement dispersé dans lequel les pays de la zone euro évoluent.

La croissance devrait rester modérée ces prochains mois. Les indicateurs avancés ne permettent pas encore d’espérer un revirement convaincant et certains facteurs de ralentissement temporaires n’ont pas encore entièrement disparu.

Mais les perspectives sont loin d’être uniformément sombres. Divers éléments font en effet pencher la balance en faveur d’une accélération limitée de la croissance économique au deuxième semestre de 2019. Le marché du travail européen demeure vigoureux. Bien que le marché de l’emploi soit sans doute appelé à ralentir légèrement, l’inflation salariale devrait continuer à soutenir l’augmentation du revenu réellement disponible des ménages et donc, la consommation. La relative faiblesse de l’inflation y contribuera elle aussi. L’utilisation des capacités progressera à mesure que le cycle conjoncturel avancera. Malgré la persistance des incertitudes, l’accélération de la demande intérieure devrait soutenir le cycle des investissements.

Ajoutons à cela que quelques-uns des risques et des facteurs qui hypothèquent actuellement la croissance devraient s’estomper au fil des mois. Les problèmes auxquels est confrontée l’industrie automobile ne devraient pas persister au-delà du premier semestre. Le conflit commercial se ranimera régulièrement, sans pour autant qu’il y ait de réelle escalade. À titre d’exemple, nous ne craignons pas de véritable confrontation entre les États-Unis et l’Union européenne à propos de l’instauration de nouveaux tarifs commerciaux. Ceci étant, les mesures protectionnistes adoptées en 2018 n’ont aucune chance d’être abandonnées. Si elle devait néanmoins être décidée, toute hausse des tarifs à l’importation des voitures et pièces détachées européennes annoncée par les États-Unis plomberait non seulement l’industrie automobile européenne, mais aussi le reste de l’économie de la zone.

L’essoufflement de la croissance économique en Chine pèse sur la demande d’automobiles européennes. Il est toutefois peu probable que l’économie chinoise effectue un atterrissage forcé: le gouvernement va continuer à la soutenir par des mesures fiscales et monétaires, qui pourraient avoir des effets bénéfiques sur la croissance de la zone euro également (encadré1: Les mesures d’encouragement chinoises soutiennent légèrement la croissance de l’économie mondiale).

Encadré 1 - Les mesures d’encouragement chinoises soutiennent légèrement la croissance de l’économie mondiale

La croissance du PIB réel de la Chine ralentit progressivement depuis plusieurs années. Ceci s’explique en partie par une stratégie délibérée, aujourd’hui abandonnée, qui visait à faire d’une économie à croissance rapide une économie à croissance qualitative. Il s'agissait d'assainir l’offre pour éliminer la surcapacité, alléger l'endettement, réduire les risques financiers et développer de nouveaux pôles de croissance. Les récents efforts en faveur de l’allégement de la dette ont provoqué un ralentissement des octrois de crédits et des investissements, ce qui a pesé sur la croissance économique. La guerre commerciale avec les États-Unis aggrave encore cette situation. Elle mine la confiance des entrepreneurs et détériore la dynamique économique mondiale.

C'est la raison pour laquelle le gouvernement chinois a décidé, en 2018, de recommencer à stimuler la croissance économique. La stabilité économique (et sociale) immédiate est remontée tout en haut de l’agenda politique, au détriment du désendettement et des réformes structurelles à long terme.

Les récentes mesures d'encouragement monétaire et budgétaire devraient en partie compenser le ralentissement de la croissance. La réduction des réserves que doivent obligatoirement constituer les banques (instrument important de la politique monétaire) et l’octroi de facilités de crédit ciblées à moyen terme visent à accroître la liquidité, en particulier grâce à une multiplication des prêts aux PME. Les mesures budgétaires consistent à alléger la fiscalité pour les ménages et les entreprises et à encourager les investissements par les pouvoirs publics locaux. L'État s’efforce de la sorte de maintenir un équilibre entre le soutien à la croissance économique et la prévention du dérapement de la dette. Augmenter les investissements en encourageant les entreprises d'État et les administrations locales à s’endetter ne ferait qu'accentuer les problèmes d'inefficacité et alourdir la dette implicite de l'État.

Ces mesures vont permettre à la Chine d’éviter un atterrissage forcé. Reste que la marge de manœuvre dont disposent les autorités est limitée par les risques et par les objectifs à long terme. C’est pourquoi les mesures de relance auront une portée plus limitée que celles de 2015-2016, par exemple. Il semble donc peu probable que l'économie chinoise s'envole en 2019. La croissance du PIB réel devrait s’établir à 6% en 2019 et à 5,6% en 2020. Les mesures d'encouragement pourraient suffire à donner un petit coup de pouce à l’économie mondiale, particulièrement au deuxième semestre de 2019.

La date fatidique du 29 mars approche à grands pas. Nous continuons de croire en un Brexit doux, bien que chahuté. Le Royaume-Uni et l’Union européenne vont finir par convenir d’un accord acceptable (ou suffisamment à double sens), qui ne fera pas déraper leurs économies.

La faiblesse de la croissance de la zone euro au deuxième semestre de 2018 - faiblesse qui devrait persister un temps encore - se remarquera dans les chiffres de croissance économique moyens de 2019. C’est la raison pour laquelle nous avons revu nos prévisions à la baisse (de 1,5% à 1,1%). Si ce chiffre est nettement inférieur à la croissance moyenne de 2018, il signifie aussi que nous escomptons une certaine accélération de la dynamique de croissance au deuxième semestre de 2019. C’est pourquoi nous continuons de miser sur une croissance de 1,4% en 2020, soit un chiffre légèrement supérieur à celui de 2019. Vents contraires annoncés pour l’économie américaine, pour l’heure toujours vigoureuse

L’activité économique américaine demeure vigoureuse. La récente mise à l’arrêt des services publics (shutdown) nous prive des premières estimations officielles d’évolution du PIB au quatrième trimestre mais tous les indicateurs disponibles sont au vert. Le marché du travail continue de tourner à plein régime, comme le montrent les chiffres, très élevés, de la création d’emplois.

L’incidence du shutdown sur l’économie devrait selon toute vraisemblance demeurer limitée. Les tiraillements politiques ont accru les incertitudes (encadré 2: Incertitudes historiquement élevées autour de la politique économique), lesquelles se dissiperont dès que les problèmes seront résolus. Si la confiance des producteurs et des consommateurs est en baisse depuis plusieurs mois, elle n’en conserve pas moins un niveau qui permet le maintien, dans l’immédiat, d’un rythme de croissance soutenu.

Encadré 2 - Incertitudes historiquement élevées autour de la politique économique

Les incertitudes qui entourent les politiques économiques mondiales se mesurent à l’aide d’un indice composé de différents articles de presse consacrés aux flottements économiques, à la stabilité budgétaire et à la mesure dans laquelle les prévisions économiques divergent. La pondération de chaque pays dans l’indice dépend de son PIB. Au niveau mondial, les incertitudes ont récemment atteint un nouveau sommet historique (figure E2). Ceci est probablement dû à la montée des tensions commerciales et à l’augmentation spectaculaire de la volatilité des marchés financiers.

Ceci découle probablement du fait que les incertitudes se sont nettement intensifiées, particulièrement aux États-Unis et en Chine. Aux États-Unis, le shutdown a sans aucun doute contribué à ce phénomène.

La réouverture (pour l’heure) des services publics américains, les manchettes encourageantes sur les négociations commerciales et la nette amélioration du sentiment sur les marchés financiers devraient réduire les incertitudes au cours des premiers mois de 2019. Dans l’UE, les craintes liées à la croissance économique ont été une source majeure d’incertitudes. Ces craintes ont trouvé un terreau fertile, du moins en partie, dans le conflit commercial et dans les interminables négociations sur le Brexit. Il faut noter que le Brexit semble peu perturber les Britanniques: les incertitudes n’ont augmenté que dans une mesure assez limitée outre-Manche.

Figure E2: Les incertitudes relatives aux politiques économiques atteignent un nouveau sommet (Global Economic Policy Uncertainty index)  

Source: KBC Economics

Le plus haut niveau de la croissance économique américaine pourrait être derrière elle, auquel cas un ralentissement serait inévitable. La balance commerciale est l’un des indicateurs en ce sens. Le déficit commercial américain a diminué, en novembre, à 49,3 milliards de dollars (figure 3), ce dont Donald Trump ne peut que se réjouir. Les résultats sous-jacents sont toutefois moins rassurants. Les exportations ayant reculé, l’allégement du déficit s’explique principalement par une chute plus vigoureuse encore des importations. Le comblement du déficit concerne la quasi intégralité des principaux partenaires commerciaux. Les chiffres relatifs à la balance commerciale demeurant volatiles, il est un peu tôt encore pour tirer des conclusions définitives, mais l’on peut penser que le litige qui oppose les États-Unis à la Chine commence à peser sur l’économie américaine.

Figure 3 - Commerce international américain (commerce de biens et services, en milliards USD)

Source: KBC Economics,d’après le Bureau of Economic Analysis 

L’économie américaine est confrontée à davantage de défis qu’à la seule mésentente commerciale avec la Chine. Le ralentissement de la croissance de l’économie mondiale va continuer de peser sur ses exportations. Le stade, très avancé, de son cycle, se fait lui aussi sentir. D’après des enquêtes récentes, les consommateurs ont de moins en moins l’intention d’acheter maison ou voiture. Dernière chose mais non des moindres: la réforme fiscale instaurée à la fin de l’année 2017 commence à ne plus sortir ses effets. C’est la raison pour laquelle nous avons revu nos prévisions de croissance, de 2,5% à 2,3% pour 2019 et de 2,0% à 1,8% pour 2020.

La Fed dans l'expectative...

Les banques centrales des principales économies adoptent, de plus en plus, une attitude attentiste. La Réserve fédérale américaine a clairement modéré ses intentions de durcir sa politique, même si son regard sur la situation économique reste globalement inchangé. Elle n'a toutefois pas dit expressément qu'elle ne continuerait pas à durcir sa politique et elle pourrait très probablement décider de le faire si les indicateurs économiques restent suffisamment vigoureux. Ceci dit, selon la déclaration faite à l'issue de la dernière réunion, il y a de fortes chances pour que la Fed prenne tout son temps avant de continuer à durcir sa politique. Elle veut ainsi pouvoir suivre de près les développements économiques et autres. La Fed estime que le risque d'une vive accélération de l'inflation est écarté. L'argumentation pour de nouveaux relèvements de taux selon le calendrier fixé ne tient dès lors plus debout.

Le président de la Fed Jerome Powell a aussi indiqué clairement que la réduction du bilan pourrait prendre fin plus rapidement que prévu (figure 4). Autrement dit, l'ampleur du bilan pourrait demeurer substantiellement plus importante qu'attendu à l'entame de sa réduction. Le volume du bilan deviendrait ainsi un instrument de la politique monétaire actif, plutôt que passif. Le changement de politique signifie également que la Fed a l'intention de maintenir davantage de liquidités dans le système financier mondial que prévu initialement.

Figure 4: La réduction du bilan de la Fed va probablement ralentir (total du bilan de la Réserve fédérale, en milliards USD)

Source: KBC Economics, d'après la Réserve fédérale

Tous ces éléments nous ont poussés à revoir nos attentes concernant la politique de la Fed. Nous n'anticipons désormais plus qu'un seul relèvement du taux directeur d'ici la fin de 2019, et non plus deux. Le cycle de durcissement de la politique se terminerait alors sur un taux culminant à 2,625%. La réduction du bilan devrait en outre aller moins loin que prévu.

…pendant que la BCE se tient sur la réserve

La BCE passe elle aussi en mode attentiste pour évaluer correctement l'évolution du contexte économique. Elle n'envisage ou ne prévoit pas de modifier sa politique dans l'immédiat. En indiquant que les risques en termes de prévisions sont plutôt orientés en baisse, elle a également laissé entendre qu'elle était encore loin de durcir substantiellement sa politique et de procéder à un premier relèvement de taux.

La BCE préfère attendre l'évolution des facteurs d'incertitude à court terme, une information qui sera par conséquent essentielle pour évaluer la politique à laquelle nous pouvons nous attendre. Nous n'ajustons donc pas encore nos prévisions à cet égard. La première étape de la normalisation de la politique des taux ne sera pas franchie avant la fin de l'été 2019.

En attendant, un autre instrument non conventionnel de la politique monétaire réapparaît sur le radar: les opérations ciblées de refinancement à long terme (TLTRO), un canal qui permet aux établissements de crédit d'emprunter des fonds à la banque centrale pour une durée jusqu'à quatre ans. Les conditions préférentielles auxquelles ce financement est octroyé doivent inciter les banques à prêter à des conditions bon marché. Le caractère 'ciblé' du refinancement implique que l'ampleur du financement que peut obtenir une banque auprès de la banque centrale est liée à l'ampleur des crédits qu'elle octroie elle-même aux entreprises et aux ménages.

Les TLTRO de 2016 arriveront à échéance en 2020. Elles seront sans doute remplacées par de nouvelles TLTRO que la BCE lancera à ce moment-là, une initiative qu'elle devrait annoncer officiellement en mars.

En lançant de nouvelles TLTRO, la BCE peut maintenir une politique suffisamment accommodante, maintenant que le programme de rachat d'actifs financiers est terminé. Elle n'exclut pas de relever les taux directeurs en 2019 afin d'atténuer les effets secondaires des taux à court terme négatifs. Elle évite ainsi la réduction de son bilan liée à l'expiration des TLTRO existantes, à un moment où la Fed devrait modérer la réduction du sien. Le lancement de nouvelles TLTRO devrait aussi aider un certain nombre de banques à continuer à satisfaire les exigences en matière de ratios de liquidités.
L'effet escompté des TLTRO sur les marchés financiers est équivoque. Si elles sont mises en place, elles auront un effet positif, mais sans doute limité, dans la mesure où les marchés anticipent déjà leur lancement. Ils pourraient par contre réagir de manière très négative si la BCE décidait de ne pas lancer de nouvelle tranche de TLTRO, compte tenu de l'intérêt de ces dernières pour le secteur bancaire. Les TLTRO devraient en outre continuer d'alléger la pression sur le lien entre les pouvoirs publics et le secteur bancaire puisque les banques pourront ainsi maintenir leurs liquidités à long terme au même niveau.

Des taux à long terme peu élevés

La modération de la croissance économique et l'inflation, et le redoublement de prudence inhérent des principales banques centrales, ont des conséquences sur les taux à long terme. La ruée sur les titres de qualité maintiendra aussi le taux sur les emprunts d'État allemands à dix ans plus bas qu'on ne le pensait. Nous anticipons désormais une remontée progressive à 0,7% (au lieu de 0,8%) d'ici la fin de l'année. Nous avons revu nos attentes pour les taux des emprunts d'État américains à dix ans à la fin de l'année de 3,25% à 3%.
Pour l'heure, les différentiels de taux au sein de l'UEM peuvent encore rester bas. Il faudra par contre tenir compte d'une remontée en cas de nouvelle poussée de l'aversion pour le risque en 2020 et à mesure que la BCE normalisera sa politique monétaire.

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Les prévisions les plus récentes

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