RBA : report ou abandon ?
Sur les marchés mondiaux, les positions ont été prises (ou réduites) à l’approche du résultat des élections américaines. Une excuse parfaite pour tourner notre regard de l'autre côté du globe, où la banque centrale australienne (Reserve Bank of Australia ou RBA) a décidé de sa politique ce matin.
Rien de vraiment neuf à signaler, mais cette absence de nouvelles fraiches est déjà en soi significative. La RBA maintient son taux directeur inchangé à 4,35 % depuis novembre 2023. Et elle n'a toujours pas véritablement ouvert la porte à un premier abaissement de taux. Si certains ont déplacé le curseur de l’inflation vers une politique plus favorable à la croissance, la présidente Michele Bullock et son comité de politique préfèrent quant à eux garder la priorité sur l'évolution des prix. L'inflation est ainsi passée d’un pic de 7,8 % fin 2022 à 2,8 % pour la période juillet-septembre. Cette amélioration est surtout due au recul des prix de l’énergie, que la RBA considère en partie comme passagère. À 3,5 %, l’inflation sous-jacente reste encore loin du milieu de la zone cible de 2-3 %. Dans ses prévisions, la RBA ne voit l'inflation revenir durablement à ce niveau que fin 2026.Des risques existent dans les deux sens. C’est la raison pour laquelle la RBA n’exclut pour le moment aucune possibilité, pas même un relèvement des taux.
Nous n'en sommes pas encore là, mais les nouvelles prévisions justifient parfaitement que la RBA attende avant d'assouplir sa politique. La croissance s'est montrée décevante récemment (0,2 % en glissement trimestriel et 1,0 % en glissement annuel au deuxième trimestre), mais l’économie reste confrontée à une demande excessive. Dans un même temps, le marché du travail demeure tendu. L’emploi continue de progresser fortement, le taux de chômage reste bas (4,1 %) et le taux de participation se trouve à un sommet historique. Les augmentations salariales (3,4 % cette année) marquent le pas, mais dans un contexte de faible productivité (croissance). Enfin, « last but not least », la RBA prévoit une redressement de la croissance (2,3 %) en 2025/26, principalement en raison d’une reprise de la demande intérieure. Bref, pas vraiment un contexte dans lequel l’inflation ralentira rapidement.
Moralité de l’histoire : la RBA a arrêté le cycle de resserrement à un niveau relativement bas. C'est en partie pour cette raison que l'inflation ne se refroidit que lentement. Si les prévisions de croissance se concrétisent, un retour à l’objectif deviendra plutôt difficile. Soit dit en passant, cela ne s'applique-t-il pas aussi, dans une plus ou moins grande mesure, à d'autres banques centrales ? Comparaison n'est pas raison, mais si la Banque du Canada, la BCE, la Banque d’Angleterre et d’autres décident de rendre leur politique moins restrictive dans le but de soutenir la croissance, on peut espérer qu'elles arriveront, l’année prochaine, à la conclusion que leur politique fonctionne.
Retour « down under ». Le marché a appris à se montrer prudent vis-à-vis des baisses de taux. Pour février (prochaine réunion de la RBA avec nouvelles prévisions), il estime la probabilité d'une réduction à seulement 30 %. Une première baisse n’est anticipée que pour fin mai. Ce matin, le dollar australien a gagné 0,5 % et le cours AUD/USD a atteint 0,6615. Il convient néanmoins de préciser que les taux (de la RBA) n'ont pas joué un rôle déterminant sur le dollar aussie ces derniers temps. Leur niveau absolu n’est pas suffisamment convaincant pour cela. De plus, le dollar australien reste sensible à l’évolution de l'économie chinoise et du sentiment général sur le marché. Cela nous ramène au sujet que nous avions jusqu'à présent éludé : les mouvements du marché liés aux élections américaines. D’un point de vue technique, la paire AUD/USD, après un recul dû au dollar US, est peut-être en train de se relever d'un plancher, avec des niveaux de support à 0,6537, 0,636 et 0,627. Reste à voir si l'évolution plus large du marché créera une marge supplémentaire dans les prochains jours.