L’industrie belge en berne
L’activité industrielle est sous pression en Belgique, mais aussi dans d’autres pays européens, depuis deux ans. Ces difficultés ont récemment été abordées dans un rapport de la KBC sur la situation actuelle de l'industrie dans notre pays (voir « Een macro-economische blik op de Belgische industrie », uniquement disponible en néerlandais). Outre un passage en revue de quelques caractéristiques thématiques (emploi, coûts du travail, dynamique entrepreneuriale, investissements, innovation, etc.) permettant d'examiner l’industrie belge sous l'angle historique et par rapport au reste de l'Europe, ce document dresse aussi un état des lieux de la situation actuelle. Nous faisons ici un nouveau point.
L’activité industrielle (hors construction) en Belgique affiche une contraction, en termes réels, de 3,2 % au troisième trimestre de 2024 par rapport au pic du quatrième trimestre de 2022. Sur cette période, l’activité dans la construction et les services a progressé de respectivement 0,2 % et 2,2 %. Ce recul de l'industrie s'observe dans de nombreux pays. Entre le quatrième trimestre de 2022 et le deuxième trimestre de 2024 (chiffres du troisième trimestre 2024 pas encore disponibles pour l'UE), l'activité a un peu moins ralenti au niveau européen (-2,4 %) qu'au niveau belge (-3,1 %). Les pays ayant enregistré la plus forte contraction (plus de 5 %) au cours de cette période sont l’Irlande, l’Autriche, la Hongrie, l’Estonie et la Suède. Dans d’autres pays, l’industrie a continué à bien se porter (croissance supérieure à 5 %). C'est le cas en France, à Chypre, en Grèce, en Slovaquie et au Danemark. Chez nos voisins néerlandais et allemands, la décélération (entre le quatrième trimestre de 2022 et le troisième trimestre de 2024) s’est élevée à respectivement à -3,1 % et -4,4 %.
Pour évaluer l’état actuel de l'activité industrielle, nous pouvons également regarder dans quelle mesure les capacités de production sont réellement utilisées. Les chiffres à ce sujet sont basés sur une enquête menée auprès des entreprises et sont plus rapidement disponibles que les chiffres d’activité objectifs (« hard figures » en anglais). Pour l’ensemble de l’industrie manufacturière belge, le taux d’occupation des capacités se situe depuis fin 2023 à un niveau (environ 75 %) qui n’avait auparavant été enregistré qu’au cours de graves crises (Grande récession en 2009, crise de la dette souveraine en 2012-2013 et Covid-19 en 2020). Il a surtout chuté dans les secteurs de la chimie, du textile, de la transformation des plastiques et de la transformation du papier, où il a atteint (quasiment) des planchers historiques.
Entre le premier trimestre de 2023 et le troisième trimestre de 2024, l’industrie belge (hors construction) a enregistré 12 000 suppressions nettes d'emplois (-2,1 %), en partie à cause d'une vague de faillites et de restructurations, avec notamment la fermeture du constructeur d’autobus Van Hool. Selon les chiffres de l’ONSS relatifs aux sous-secteurs industriels, les récentes pertes d’emplois ont surtout touché la production automobile, le textile et le secteur du bois et du papier. Dans le secteur pharmaceutique et la fabrication de produits informatiques, il est encore question d'une timide croissance de l'emploi.
Les indicateurs de sentiment indiquent que le malaise dans l’industrie va persister dans les prochains trimestres et que l'économie belge va continuer de croître à un rytme modéré. L'inquiétude des industriels est en grande partie due à l'accroissement des incertitudes autour des perspectives de croissance de l’économie européenne. Dans notre scénario de novembre, nous avons revu à la baisse notre prévision de croissance du PIB belge pour 2025 à 0,6 %. Cet ajustement s'explique par l'exposition de notre pays au choc commercial qui sera provoqué par les politiques protectionnistes du prochain président américain, Donald Trump. Ce protectionnisme risque de nuire gravement à l’industrie belge, très axée sur les exportations, et qui affiche d'importants échanges avec les États-Unis.