Tout doit partir: les États-Unis soldés

Cela fait maintenant une semaine que le président Trump a présenté les tarifs réciproques par lesquels il prétend restaurer l’équilibre de la balance commerciale. Ils entrent en vigueur à partir d’aujourd’hui. Ceux qui entretenaient l’espoir d’accords de dernière minute ou d’exemptions temporaires ont de quoi être déçus, car c’est tout le contraire: pour la Chine, un tarif supplémentaire de 50% s’ajoute même aux 54% annoncés. Ainsi, chaque produit fabriqué en Chine qui franchit la frontière américaine coûtera soudain deux fois plus cher.
L’emblématique carte en carton est devenue le symbole du deuxième mandat de Trump et continue à provoquer une volatilité extraordinaire. Le chaos a beau être total, une constante se dégage: USA? Sell! Il en résulte un affaiblissement du dollar, même lorsque le marché se contracte, comme c’est toujours le cas aujourd’hui. Mais la devise américaine n’est pas la seule à ne pas profiter de son (ancien?) statut de valeur refuge. Les obligations d’État américaines se voient dégradées, et plus la durée et longue, plus le risque est élevé. C’est justement ce risque que le marché n’est plus près à courir – du moins, pas sans une forte compensation sous la forme d’une rémunération en intérêts majorée. Le “reset” se déroule à une vitesse vertigineuse. Ce matin, le taux américain à 30 ans – la plus longue échéance – a brièvement dépassé le cap ultra-symbolique des 5%. Il s’agit du niveau le plus élevé depuis fin 2023 (5,2%), qui représentait alors un sommet en 16 ans. Sur les trois – trois! – derniers jours, cela équivalait à 70 points de base, un véritable désaveu du label de qualité “USA”. Dans ce contexte, le flop de l’adjudication des effets publics à trois ans hier n’a rien de surprenant. Remarquons que les taux à 10 ans et à 30 ans se sont aussi envolés; ce soir ou demain, le Trésor américain mettra en vente des titres avec ces échéances. Le marché sent venir l’orage. Mais même compte tenu de l’érosion de la confiance et de l’augmentation des primes de risque, une hausse des taux de ce calibre, pour le plus grand marché au monde, est tout à fait exceptionnelle. En coulisses, la liquidation forcée de positions importantes prises à crédit met de l’huile sur le feu, surtout maintenant que la liquidité est plus faible que d’habitude. Selon les rumeurs, la Chine fait monter la pression dans la guerre commerciale avec les États-Unis en vendant massivement des obligations d’État américaines. Elle en détient le portefeuille plus important après le Japon, et est en train de le réduire depuis quelques années.
Quelles que soient les raisons profondes, l’on a ouvert la boîte de Pandore et les États-Unis n’en sont pas la seule victime. Au Japon, le taux à 30 ans a grimpé de 17 points de base. La Banque du Japon, le ministère des Finances et l’autorité de surveillance financière tiennent des réunions d’urgence. Le Royaume-Uni est également mis à l’épreuve: le taux britannique à 30 ans se rapproche d’un sommet inédit depuis 1998, et la réserve budgétaire reconstituée au prix de grands efforts par la ministre des Finances Reeves fond comme neige au soleil. Les obligations d’État allemandes font exception, s’imposant comme une alternative sûre face aux obligations américaines. Mais pour combien de temps, eu égard au “whatever it takes” de Merz?
Les taux américains à 30 ans atteignent un niveau record de 5%
