EUR/USD : en route vers 1,1276

Bonne nouvelle : la situation est devenue plus claire. Mauvaise nouvelle : les droits de douane réciproques annoncés hier par les États-Unis ne constituent pas un plafond comme on aurait pu l'espérer. Il reste une marge de négociation pour essayer de descendre au taux minimum (10 %), mais la menace d’une nouvelle surenchère est tout aussi présente. Du point de vue du marché, la menace et l’incertitude pèsent plus lourd que l’espoir.
Tout le monde a désormais vu le tableau. « Tarifs Charged to the US », voilà la base de la nouvelle politique commerciale américaine. Cette taxe à l’importation ne correspond pas (toujours) au taux moyen effectif qu’un pays donné impose sur les marchandises américaines. Pour calculer ses chiffres, la Maison Blanche a procédé comme suit : déficit commercial sur la balance des marchandises/volume total des importations américaines du partenaire commercial concerné, éventuellement augmenté en cas de manipulation des changes ou d’autres entraves au commerce (ex. : quotas). Traitement dans Excel. IF(“Tariffs Charged to the US” <=20%; 10%; 0.5*”Tariffs Charged to the US”). Ctrl+D. Mise en page rapide, impression au format B0 et showtime !
Ce matin, les marchés ont affiché, dans un réflexe pavlovien, une réaction d'aversion pour le risque. Par exemple, les bourses européennes ont ouvert en baisse, avec un recul de 2,5 % pour l’EuroStoxx50. La baisse s'est pour le moment interrompue, mais nous attendons au moins l'ouverture des marchés aux États-Unis avant de tirer des conclusions provisoires. En fonction du secteur ou des lignes d’approvisionnement (géographiques), on constate déjà des mouvements très variés autour de l'indice. Quant à l’impact économique de la guerre tarifaire, tout le monde s'accorde sur le fait qu'elle entraînera une inflation plus élevée (à court terme) et une croissance plus faible (à moyen terme). Comme lors des deux dernières semaines, le marché se focalise aujourd’hui davantage sur le "STAG" que sur le "FLATION. Les taux américains et européens dévissent et la courbe se pentifie. Les marchés monétaires comptent sur le soutien des banquiers centraux. Aux États-Unis, le marché table sur des baisses de taux en juin, septembre et décembre. Nous continuons de penser que contrairement à 2018, le contexte inflationniste ne permettra pas de baisses de taux de soutien à la croissance. Le président de la Fed, Jerome Powell, s'exprimera demain soir sur les derniers développements et leur incidence attendue sur l'économie. Le réveil pourrait être rude. Position attentiste, pause plus longue dans le cycle monétaire et risques de hausse de l'inflation encore plus importants. La partie longue de la courbe américaine (10 ans) teste aujourd’hui le niveau de support de 4,06 % (reprise de 62 % sur la hausse observée entre septembre et janvier et ligne de cou de la figure épaule-tête-épaule). Les taux européens et britanniques suivent le même mouvement qu'aux États-Unis. Tout à coup, le marché monétaire européen anticipe un plancher du taux directeur de la BCE à 1,75 %. Nous continuons de tabler sur une dernière baisse de taux en avril (-25 pb) et sur une longue pause par la suite.
Sur le marché des changes, le dollar paie la facture. Tout d’abord à cause d’une prime de risque de récession, à partir d'une forte croissance. Ensuite, en raison du délitement de l’institution "États-Unis". Le cours EUR/USD est passé de 1,08 à un nouveau sommet annuel au-dessus de 1,10. La prochaine solide zone de résistance se situe autour de 1,1214 (somment de 2024)/1,1274 (reprise de 62 % sur la baisse du cours EUR/USD entre 2020 et 2022)/1,1276 (sommet de 2023).
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC
EUR/USD : en route vers la zone de résistance de 1,1214/74/76.
