La CNB franchit un premier cap symbolique

Les retombées inflationnistes de la politique hyperstimulante menée à cause du coronavirus avaient forcé les pays d’Europe centrale à faire partie des premiers à appuyer sur le frein monétaire en 2021. Une de ces banques centrales (la CNB tchèque) s'était montrée une plus convaincante et déterminée que d'autres (banques centrales polonaise et hongroise) dans cet exercice. Avant sa réunion de politique du 21 décembre, la question était donc de savoir si la CNB allait également faire un premier pas symbolique dans l’autre sens. Le comité de politique a finalement répondu à cette question par un « oui » unanime. La CNB a légèrement abaissé son taux directeur de 7 % à 6,75 %.
L’approche orthodoxe de ces 2,5 dernières années commence donc à porter ses fruits. L'inflation générale est passée de 18 % à l’automne 2022 à 7,3 %. L'L’inflation de base est même retombée de son sommet de 14,3 % à 3,9 %. En outre, la CNB s’attend à ce que l’inflation s'approche de la barre des 2 % au deuxième trimestre (2,2 %). L’inflation de base, plus tenace, reste bloquée entre 2 % et 3 % et, de l'avis de la CNB, il restera encore pas mal de pain sur la planche pour pouvoir la ramener durablement à 2 %. En outre, le comité de politique surveillera de près dans quelle mesure les entreprises répercuteront l'augmentation de leurs coûts (notamment les coûts salariaux) sur le consommateur lors de leurs adaptations de prix en début d’année. Cela sera toutefois moins évident maintenant que l’économie flirte avec la récession (-0,5 % en glissement trimestriel au troisième trimestre, croissance nulle attendue au quatrième).
Quoi qu’il en soit, le taux directeur réel deviendra clairement positif à partir de ce mois-ci. Cela permettra à la banque centrale d'assouplir progressivement sa politique tout en maintenant l’équilibre entre l’offre et la demande (et donc l’inflation). Si les hausses de prix ne « déraillent » pas en début d’année, la CNB pourra alors passer à des baisses de taux de 50 points de base à partir de février. Nous tablons sur un taux directeur à 5 % à la fin du deuxième trimestre et à 4 % à la fin de l’année, une prévision un peu plus conservatrice que celle de la CNB elle-même (3,4 %).
L’approche orthodoxe de la CNB n’a pas aidé la couronne tchèque ces derniers temps. Depuis le deuxième trimestre de l’année dernière, la monnaie a clairement sous-performé ses homologues, le zloty et le forint. La couronne a perdu 6 % par rapport à l’euro sur cette période, même si cette dépréciation doit être remise dans son contexte. À la mi-avril, la devise tchèque se trouvait en effet à son niveau le plus élevé depuis 2008 après un important rallye « post-coronavirus » ! En outre, en 2022, la CNB avait accompagné sa politique de taux restrictive d’interventions sur le marché des changes. Or, cette arme a entre-temps été remisée et il est peu probable qu’elle soit réactivée dans un contexte d’assouplissement monétaire. Le couronne pourrait donc encore légèrement souffrir, surtout si les taux d’intérêt dans les grands pays repartent à la hausse après leur récente chute.Nous considérons toutefois le cours EUR/CZK de 25,00-25,25 comme un solide niveau de résistance (support pour la couronne). Le maintien des taux réels en territoire positif et le regain de crédibilité de la CNB pourraient aider la monnaie tchèque plus tard dans l’année si les grandes banques centrales (avec la Fed à la tête) assouplissent également leur politique monétaire.