La MNB se jette à l’eau...
Il y a trois semaines, nous avions expliqué que la banque centrale hongroise (MNB) avait enclenché le mode « cruise control » lors de sa réunion de politique. La banque centrale avait alors clairement écarté l'idée d'une baisse progressive du taux d'intérêt d'urgence de 18 % (taux de dépôt O/N). Ce taux a été créé en octobre de l’année dernière dans le but d' assurer la stabilité financière. En d’autres termes, mettre un terme à la chute du forint. Ce relèvement des taux d’intérêt était, au même titre qu'une série d’autres mesures visant à limiter les liquidités, nécessaire pour convaincre le marché que la banque était bien déterminée à lutter contre l’inflation galopante (20 %+). Le taux directeur officiel de 13 % n'était clairement plus suffisant pour y arriver, même si la MNB ne voulait pas l’admettre ouvertement.
On ne peut pas vraiment parler de coup de théatre, mais les propos tenus par le vice-gouverneur de la MNB, Barnabás Virag, hier matin ont tout de même légèrement surpris. Ce dernier veut progressivement abaisser la limite supérieure de la fourchette de taux (complexe) entre 12,5 % et 25 %. Peut-être déjà lors de la réunion de la semaine prochaine. En soi, ce taux n’est pas si important pour les marchés. Il s’agit toutefois d’un premier pas avant une diminution progressive du taux de 18 % en mai ou juin. Cela équivaudrait donc à un début de sortie du régime d'urgence. Ce signal envoyé au marché a clairement été dicté par la récente remontée du forint. La MNB se voit ici confrontée à une sorte de dilemme du prisonnier. La vigueur relative du forint est en effet aussi en grande partie due au taux de dépôt de 18 %. En outre, ce signal est donné alors que l’inflation dépasse toujours les 25 % (25,2 % en glissement annuel en mars). Virag table sur un net ralentissement de l’inflation plus tard dans l’année, mais le passé (récent) a montré que l’inflation ne se comportait pas toujours comme les banquiers centraux et les analystes le prévoient. Ce constat ne s’applique naturellement pas uniquement à la Hongrie. Il n'est évidemment jamais facile de préparer les marchés à un revirement de politique. Mais il aurait peut-être mieux valu attendre que l'inflation montre des premiers signes clairs d'essoufflement (en avril avec un peu d'espoir) avant d’ouvrir la porte à une normalisation des taux.
Le marché a réagi comme il fallait s'attendre. Les taux du marché monétaire ont chuté de 50 à 60 points de base. L’intervention de Virag a également mis un terme à la remontée du forint observée depuis la fin de l’année dernière (qui avait déjà été un peu interrompue par les turbulences financières du mois de mars). La monnaie hongroise a entre-temps perdu plus de 2 % par rapport à son sommet d'environ EUR/HUF 370 en début de semaine. Quoi qu’il arrive, la MNB s'est engagée dans un exercice d’équilibriste très délicat. dans lequel les considérations monétaires ne sont pas les seules à peser dans la balance. En coulisse, le gouvernement met également la pression pour que les taux d'intérêts soient diminués. Les événements de cette semaine nous confortent dans l'idée que de nombreuses bonnes nouvelles avaient déjà été intégrées dans le cours du forint. Le seuil de EUR/HUF 370 se profile comme un solide support pour la paire EUR/HUF (résistance pour le forint). Un nouvel affaiblissement du forint en direction de 390/400 signifierait que la MNB a de nouveau été trop vite pour annoncer un revirement de sa politique. En outre, il faut aussi espérer pour la banque centrale que le sentiment de marché global ne provoque pas de nouvelles turbulences.