Les banquiers centraux tracent leur propre chemin en Europe centrale

L'actualité est toujours dominée par les tensions géopolitiques. Un contexte qui joue en faveur de l'or, du yen japonais et du franc suisse et qui met les taux américains, les bourses et le dollar sous pression. La probabilité que les statistiques américaines ou le discours du président de la Fed, Jerome Powell, modifie la donne aujourd'hui est plutôt mince. Si les yeux sont essentiellement tournés vers les grandes banques centrales, les réunions de politique monétaire prévues en Hongrie et en Tchéquie méritent tout de même aussi notre attention.
Nouvelle hausse du taux de dépôt par la MNB?
Cet après-midi, il est possible que la banque centrale hongroise procède à un nouveau relèvement de son taux de dépôt, après celui effectué en fin mars (-0,15% à -0,05%). L'intervention du mois de mars a marqué le début symbolique d'un processus de normalisation de politique, qui a depuis lors déjà ralenti. Début symbolique, parce que la MNB a au même moment annoncé le lancement d'un nouveau programme d'achat d'obligations d'entreprise (à partir du 1er juillet). Au premier trimestre de cette année, le forint avait gagné beaucoup de terrain en prévision d'un changement de cap monétaire, avec un cours EUR/HUF passant de 322 à 313. Mais en fin mars, la paire de devises avait renoué avec ses niveaux de début d'année, voire plus haut. Retour à aujourd'hui. L'économie hongroise ne montre pour le moment pas beaucoup de signes de faiblesse. Au premier trimestre, le PIB a enregistré une croissance de 1,5%, principalement grâce à la consommation intérieure (hausses salariales réelles) et aux investissements liés à l'utilisation des fonds européens. Outre la vigueur de la croissance, l'inflation générale (3,9% en glissement annuel) et l'inflation de base (4% en glissement annuel) se trouvent toutes les deux dans la partie supérieure de la fourchette "acceptable" de 2%-4%. Cette combinaison de croissance et d'inflation crée de la place pour une deuxième hausse prudente du taux de dépôt, de -0,05% à 0,05%. Faute d'allusions à de possibles autres interventions, cette hausse n'aura à elle seule vraisemblablement pas beaucoup d'impact sur le forint. Elle permettra néanmoins de mieux protéger le plafond du cours EUR/HUF, surtout tant que la BCE sera encline à assouplir sa politique.
Baisses de taux en Tchéquie?
Demain, ce sera au tour de la banque centrale tchèque (CNB) de faire connaître sa décision. En début mai, celle-ci avait encore rehaussé son taux directeur, de 1,75% à 2%. Ensuite, la banque avait adopté une attitude assez prudente: "le prochain mouvement de taux pourrait aller dans les deux sens". Il y a peu, le gouverneur Jiří Rusnok a expliqué qu'il s'attendait surtout à une politique inchangée dans les 12 prochains mois. Les fêlures affichées par la croissance tchèque doivent être mises en regard de l'inflation. Celle-ci a grimpé à 2,9% en glissement annuel et est également proche de la limite supérieure de la marge de fluctuation acceptable de 1% autour de l'objectif de 2%. Contrairement à ce qui se passe, par exemple, aux États-Unis ou dans la zone euro, nous ne pensons pas que la CNB utilisera un biais accommodant. La couronne tchèque se trouve toujours à un niveau inférieur à celui où la banque centrale l'attend (EUR/CZK 25,30 en moyenne). Tant que Rusnok et ses collègues n'annonceront pas de baisses de taux, la balance sur le marché des changes continuera probablement de pencher en faveur de la couronne tchèque. La paire EUR/CZK flirte avec la limite inférieure du canal dans laquelle elle évolue depuis quelques mois (EUR/CZK 25,40).
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC
Le cours EUR/CZK flirte avec la limite inférieure du canal (25,40) dans lequel il évolue depuis quelques mois.
